L'Euramérique - cours 1 et 2

Euramérique
Faut élargir l’élargissement de l’UE avec une dimension plus vaste : une Europe qui n’est pas bornée aux limites fixées par Bruxelles càd économique et administrative ; or on pourrait étendre l’Europe au continent Américain (surtout du sud).

Introduction  Europe-Amérique Latine : un destin commun ?
1.       De l’Europe à l’Euramérique 

a.       Définitions géographiques
Toutes définitions géo-historiques de l’Europe nous mène à une aporie* (une voie sans issue intellectuelle) ; si l’on réfléchit sur les limites de l’Europe, notamment orientale – pose des problèmes :
-          Russie (Alain Besançon) ? Pour les Polonais, la Russie n’est pas l’Europe, ce sont des barbares asiatiques ; pour les Ukrainiens, sont plus partagés (riots actuelles) ;
-          Grèce ? Depuis l’antiquité, ils se disent non-européens : le courage des européens, et l’intelligence des asiatiques – sont exceptionnels et situés au centre. L’Europe est située à l’Ouest, et donc là où le « grand gouffre »/la « fin des terres » se trouvent.
-          Pays Baltes ?
Limite méridionale – si on pose la matrice de l’Europe, l’Empire Romain, de facto l’Afrique du nord est européenne (Projet d’Union Méditerranéen préférée à une association avec l’AmLa et les Caraïbes) – inclut Saint Augustin. Cette frontière pose également beaucoup de problèmes.
Limite septentrionale – pose un peu moins de problèmes. Les Finlandais se sentent européens contre le fait d’être russe.
Limite occidentale – est un véritable enjeu aux XVI et XVIIe. La reconquête sur les Maures, dans la tête de Charles Quint  (Charles 1er d’Espagne, et Charles X en Amérique du Sud) au début de son mandat en tant que roi, veut continuer la reconquête de l’autre côté de la Méditerranée et aussi de l’autre côté de l’Atlantique. Premier à penser à étendre cette frontière à l’ouest et au sud, d’un même mouvement, il veut étendre la république des chrétiens (Europe=chrétienté). Charles Quint change la devise de l’Espagne Nec plus ultra (pas plus loin que les collines d’Hercule) devient Plus Ultra (qui passe outre Gibraltar).  Historiquement : c’est pour contrebalancer le protestantisme de l’est, et a le sentiment que l’Europe a perdu la bataille à l’est (Empire Turc, faudra attendre la bataille de Lépante en 1571).
Cette progression vers l’ouest à l’air de correspondre à la théorie du privilège péninsulaire. Grèce, Rome – deux péninsules qui ont dominé la Méditerranée. Puis passe à la péninsule ibérique, Chonu dit que l’Espagne va dominer le monde parce qu’une fois de plus, c’est un pays qui a un maximum de fronts d’eau, et donc lui donne un avantage géopolitique. Et la France qui prend le relai : pas glorieux, ensuite échec des Pays Bas ; et après l’Angleterre – qui devient maitre des eaux ; et le pouvoir passe aux EU qui est le continent péninsulaire : deux côtes. Théorie très euro-centrée.
Logique territoriale de l’Europe : a toujours été une donnée changeante, variable. L’Europe des 6 : c’est Empire de Charlemagne ; l’Europe des 27 : Respublica à pourquoi décider que telle ou telle géométrie est celle qui reste ?
Au XVIe, on ne parle jamais d’une géographie européenne, c’est une des 4 parties du monde. Europa, Africa, Asia, America – l’Europe est une allégorie comme les autres ; relation entre America et Europe, relation filiale : Amérique est fille de l’Europe, elle est jeune et on lui fait toujours dire qu’elle est le lieu de régénération de l’Europe. Recherche en Asie, une sagesse ; en Afrique, le blé.

b.      Définition philosophique de l’Europe
Plus facile qu’une définition géo-historique, mais n’est que le corollaire que ce qui est écrit ci-dessus Delsol : livre sur l’identité européenne, les européens seraient fondamentalement irrévérencieux : audace, invention de la liberté – cette idée est très ancienne, se retrouve chez Hegel, l’Europe est habité par le complexe d’Ulysse, tout Européen est un Ulysse en devenir càd se projette sur la mer, et de ce fait invente la Liberté.
-          Cabotage pour les musulmans qui ne voyageaient qu’avec des rames qui ne peuvent aller en haute mer
-          Les chinois ont des énormes bateaux, et décident de détruire leur flotte après la conclusion : nous sommes les seuls civilisés, vaut pas le coup d’avoir des bateaux, pas la peine de voir des Barbares crus/nus. J
Hegel : Europe est la seule civilisation qui se projette sur la mer et donc la seule à inventer la liberté ; l’Europe ce n’est pas la fin des terres, mais c’est « celui qui voit loin (vers l’ouest)» - Zeus europos. Cette vision philosophique de l’Europe a tendance à définir l’Europe comme un héritage sédimenté (Grèce - démo, Rome - loi, Judéo-christianisme - foi, Allemand –philo, France –la révolution est le point ultime), de fait on situe la modernité en Europe, et la situer dans le triangle Paris-Londres-Berlin. Il y a des périphéries achevées et glorieuses autrefois (Italie, Grèce), sauvages et incertaines (Europe centrale et orientale).
è Logique héritée des Lumières et des philosophes allemands : centre nord européen comme matrice de la civilisation.
L’Amérique : une humanité en devenir, dans l’enfance -- Philo de l’histoire de Hegel (voit l’Asie comme des penseurs, pas des philosophes ; l’Afrique, ressources) ; et l’Amérique c’est la fille de l’Europe et donc forcément ingénue, càd qui vient de naître mais démarre seulement, naïve (vient de naitre).

c.       Définition culturelle de l’Europe car elle suppose l’altérité
Edgar Morin, Penser l’Europe ; avant le traité de Maastricht ; ose dire que l’Europe n’est pas définissable géographiquement ou philosophiquement, elle n’a de sens que face à l’Islam. Terme « européen » : chanson de Roland de Roncevaux (le nom des tentes quand ils quittent la péninsule Ibérique) ;  Charlemagne se fait virer d’Espagne par une armée conjointe de  Maures et Basques et pour se venger met à sac la ville de Pampelune. Roland est resté en arrière pour maintenir les positions, et est tué par les armées Sarazins et basques.
Ensuite au MA – et surtout au XVI et XVIIe ; pour Morin, l’Europe ne peut se sentir solidaire que face à l’Islam, bataille de Lépante, et les Turcs assiègent Vienne (s’ils avaient réussi l’Europe aurait un autre visage). Pendant longtemps se face à face se maintient, tout change avec la découverte de l’Amérique.
Amerigo Vespucci – en 1502 : lettre au pape ; et cartes veillent de 150 ans. Donc l’Amérique étaient connue des portugais (cartes dans la tour de Belèm), des turcs, les normands – secret commercial.
Celui qui le premier a conscience que l’Amérique est autre chose c’est Vespucci: « Nuvo Mondus », lettre de 1502, homme florentin, de la Renaissance. Colomb  n’a pas le sentiment qu’il découvre quelque chose de neuf, il pense que Cuba c’est le Japon. Ce nouveau monde pose un problème à l’Europe : problème d’ordre anthropologique, parce que face à l’Islam : face à face dans un même genre humain, une égalité, ils croient en le même Dieu Unique. L’Islam c’était l’autre, mais dans le même genre humain, mais la découverte de l’homme américain (cannibales pour certains) : est-il un homme ? Les récits de la conquête du Mexique (Cortès) sont terrifiants : sacrifices de 30 000 personnes par les Aztèques pour montrer aux Espagnols que la puissance est de leur côté ; et l’entrée à Mexico, fleuves de sang – ont entre dans les enfers.
Cortès trouve à Mexico des œuvres d’art et les envoie à Rome pour montrer au Pape, qu’il a trouvé une autre humanité qui devra subir rédemption parce qu’elle ose manger de la chaire humaine, et par le sacrifice humain. Masque mixtèque à Rome, 1530s,  recouvert de mosaïque : ce n’est pas possible parce que ne sont pas civilisés, alors que c’est la même technique que les anciens romains. Ceci pourrait représenter ce qui nous manquer de l’Antiquité, on a découvert les derniers païens pour que le Christianisme puisse s’étendre à la dernière région du monde.
Autre humanité, païenne, mais c’est providentiel : destin de l’Europe de convertir ces gens-là comme jadis les Empereurs romains chrétiens avaient décidé.
Véritable altérité en Amérique : l’Européen va vouloir l’annuler, et faire de l’Amérique la terre promise de l’Europe, le champ de tous nos rêves inaccomplis, et toutes nos utopies. Semble inhumaine au premier abord, mais on va la transformer en utopie. Drame de l’Amérique.
A partir de 1571, l’Amérique n’est plus en relation d’altérité avec l’Europe. L’Espagne domine le monde, et est en position de force face à l’autre islamique et a enfin réduit l’altérité américaine ; l’Amérique n’est plus l’Autre. Altérité gommée : autorisation d’avoir à nouveau leurs propres fêtes dans les années 1600 parce que l’on considère que la colonisation de l’imaginaire est accomplie, ceux sont des métisses culturels.
Les conquistadors, hommes de fer, mais derrière eux arrivent des clercs. 1519 : conquête de Mexique, en 1521 : envoie 12 franciscains à pied, pieds nus (pour les Mexicains : pieds nus = fantôme), parlent mexicains, mangent peu, en robe de bure. Sanghoun : vont convaincre de la supériorité du christianisme sur les cultes précolombiens. Reconnaissent leur défaite intellectuelle : votre Dieu est plus puissant que les nôtres, et donc on vous accepte. 
L’altérité est gommée parce que les Mexicains acceptent de devenir chrétiens, et tombent amoureux de nos auteurs gréco-romains ; notamment les métamorphoses d’Ovide, dans lequel ils trouvent le miroir de ce qu’ils étaient (peintures) : colonisation de l’imaginaire et donc la relation d’altérité s’est effacée très rapidement.
Devient fils de l’Europe avec beaucoup de facilité.

d.      Euramérique : réalité géopolitique
Janvier 2013, Santiago, 7e sommet UE, AmLa, Caraïbes (UEALCA) : a été décidé que désormais l’espace commun d’éducation supérieur va être fusionné. Ecoles communes, équivalences de diplômes, collège en sciences sociales commun. Réussite cela veut dire qu’ils se sentent proches de nous : s’inscrit dans uen politique euraméricaine.
Depuis 2008, Merkel décide que l’AmLa est la priorité de l’All sur le plan international. Lima en 2008, sommet UE et Amérique Latine, Sarkozy, président de l’UE décide de ne pas venir – devait sceller les épousailles. Et préfère aller au sommet de l’Union Méditerranéenne à CHOC !  Donc AmLa – s’allie avec la PEC (avec la Chine). Véritable drame pour l’Europe, et échec certain ! Merkel s’émerveille de l’AmLa et la place en priorité : virage de la PE allemande, sur ce coup de tête (comme avant 1914).
Autres pays qui s’intéressent à l’Amérique latine : les chinois (mines, ports, nouveau canal pour concurrence Panama), et les Américains des EU. H.Clinton, ministre des affaires étrangères en voyant la montée de la Chine (achètent les terres toutes autour du canal de Panama, achètent la moitié d’un Etat du Brésil : financement durable…), décide de reconstitue l’hémisphère occidental (expression de 1822 qui veut que l’Am du nord et du Sud forme l’hémisphère de la démocratie, face à l’Europe, monde usée, et face à l’Asie qui ne sera jamais démocratique).
Réactions européennes : autre option, celle de l’Euramérique – position du MAE Français, des Espagnols et des Allemands. Cette logique est d’abord pensée par les espagnols dès 1992, roi d’Espagne Juan Carlos : nous allons célébrer la rencontre de deux mondes (pas celui de la découverte de l’Amérique) – les sud-américains sont mécontents parce que sinon on tait les cruautés commises par les conquistadors.
RQ : Bataille des commémorations : en 1983, bicentenaire du départ du dernier redcoat, avait déjà avancé les pions de l’hémisphère occidental.
En 2010, les Espagnols vont célébrer le bicentenaire de la libération des républiques américaines à mécontentes : c’est leur victoire.
Euramérique, donnée géopolitique réelle soit :
-          Hémisphère occidental
-          Euraméricain : Espagne en pointe, France en franc-tireur, Allemagne en bailleur de fonds (milliards et milliards d’euros).

2.       Question mal posée : que reste-t-il de l’Europe en Amérique  Latine ?

a.       L’Europe serait-elle dotée d’une substance ?
Colloque avec ce titre-là. Réponses possibles : on a l’impression que l’Europe est douée d’une substance. Pourrait-on plutôt parler d’un style européen qui serait conservée en Amérique. Style de quelle Europe ?
Sweig s’est installé au Brésil en 1940, et s’en ai fatigué : pays où chaque jour est un nouveau jour, impression de vivre à l’âge d’or mais aucune dimension prométhéenne. N’en peut plus de la bonne humeur, de la fête, et du fait que l’on renvoie tout au lendemain.
« Paradis de tristesse » à propos du Brésil : même sentiment qu’il manque une dimension propre à l’homme européen, la dimension prométhéenne, l’idée de progrès, du temps qui avance.
Sarniento, argentin, un espagnol ou un américain du XVIe a dû dire « j’existe donc je ne pense guère » - le latino-américain se contenterai d’exister pour finalement ne pas penser ; voilà pourquoi on n’avance pas : préfère vivre d’abord, et pourquoi penser.
Carpentier, cubain, prix Nobel, Le Recours de la méthode au début de chaque chapitre met une citation de Descartes, pour ensuite montrer que l’Amérique Latine n’est pas l’Europe de Descartes. L’AmLa sera a jamais pré-moderne, toujours baroque, une sorte d’Europe antérieure à livre qui plait aux Européens : ont l’a toujours dit, c’est une enfant.
Brasilia a toujours fasciné les Européens -- se projettent enfin vers l’avenir au nom du progrès. Malraux fait un discours à l’inauguration de Brasilia, discours de malade, et convainc De Gaulle de faire un voyage en AmLa en 1964 qui visite une 10aine de pays.
Ecuador, Gallimard, Henri Michaud, 1928 va en Equateur pendant un an. Pourquoi il déteste l’AmLa, les Indiens de Quito, et les gens qui ne lui apportent rien. Il va ensuite adoré l’Amazonie.
Gombrowicz, polonais, en 1939 sur un paquebot pour animer les soirées littéraires, en escale à Buenos Air en 1939, Hitler attaque la Pologne, et doivent repartir pour faire la guerre, mais il reste en Argentine jusqu’en 1966 ; Transatlantique : terrible mais intelligent. Sentiment que l’AmLa cherche à n’être qu’une pâle copie de l’Europe, sont déçu des élites blanches (mimétiques).
CCl : déception de ce continent, et le seul élément qui rappelle l’Europe est l’esprit de révolution, et c’est dans ces moment-là qui deviennent prométhéens. Les latinos-américains font le jeu de ces discours (livre : Péché originel de l’Amérique par un Argentin, en 1941  « un enfant qui a grandi mais qui reste sans expérience »).
b.      Des traces d’Europe ? : une approche très post-moderne
Plait beaucoup aux latinos-américains aujourd’hui Jesus Martin Barbero : palimpseste – textes dont on n’a pas tous les signes, et pour Martin-Barbero, l’Am La serait un vaste palimpseste.
Un pays latino-américains peut être fait de traces : pour les brésiliens c’est le cannibalisme (mythe fondateur)… Traces assemblées pour montrer : voilà notre nationalité.
Problème : les traces elles-mêmes d’hispanité sont complexes ; l’Espagne elle-même est le fruit d’un métissage important, c’est la fusion de 3 cultures : juive (15 siècles - Tolède), musulmane (7 siècles) et chrétienne (moradal vidal) ; ce ne serait pas une Espagne unie. Si on cherche des traces d’Europe en Amérique Latine – certainement des traces d’Islam à travers l’Espagne. Ex : Eglise au Pérou, maniérisme avant 1591 (alors que l’on pense que c’est du Baroque) et donc de style arabo-musulman. Jeu complexe. Ex : Premier ville fondé par Quesada, juif est la Tora. 
Les traces d’hispanité – hispanité est elle-même un palimpseste. Toutes les familles qui commencent par « San » sont d’origine juive.

c.       Parler d’AmLa  expose fatalement à la critique
Expression même d’AmLa est réfutée dans beaucoup de pays parce que ça renvoie à un rêve géopolitique de Napoléon III ; et beaucoup d’intellectuels proposent d’autres noms : les Amériques latines (Carlos Fentes), Amérique indo-ibéro-africaine (Candido Mendès).
Ce discours pour débaptiser l’AmLa est sous l’influence du multiculturalisme nord-américaine, Handbook of American Indians : la latinité n’est qu’un écran, et l’AmLa doit revenir à ce qu’elle est càd une Am plurielle où l’on va mettre en valeur les Indiens, les premiers habitants (post-colonial studies).
Galinier, et Moliné : les Néo-Indiens, 2007. Paradigme change en 20 ans – on passe du marxisme au new-age. Néo-Indiens sont partout, et ils se disent indiens (si prouve qu’il y a un grand-père indien pour avoir des terres, en Colombie, nouvelle constitution en 1991).
Murra, spécialiste des Andes, il est nord-américain, les héritages culturels pré-colombiens étaient extrêmement divers. Une  famille royale a essayé de dominer le tout, mais les grands empires essentiels (Incas/Aztèques) ne sont qu’une illusion. Ces grands empires sont tombés en quelques semaines parce que les indigènes avaient été assouvis par ces grandes lignées, et se sont battus aux côtés des espagnols. Ce qui est andin n’existe pas : c’est une complexité, et dire que des gens très divers ont pu vivre ensemble.
Réalité est autre :
-          Le métissage : l’Am La est une Amérique métisse (auteur argentin) ; le métisse maitrise plusieurs identité, est rusé. Veut l’appeler Amérique Ladine (ladino : métisse). Garcia Marques : ce que l’Am La a de meilleur c’est son humanité, justement parce qu’elle est métisse, le creuset de l’humanité future d’un métissage mondial. Serait en avance, elle préfigure le monde avenir. Elle est déjà palimpseste et déjà métisse.
RQ : voir Blade Runner, 1982, de Ridley Scott.
-          L’Am La offre une singulière modernité. Discours d’outre-barbarie, Leopoldo Zea : l’Amérique latine n’est pas l’Amérique anglo-saxonne, ni l’Europe, et la civilisation c’est être soi-même.

3.       L’Euramérique comme espace de transfert culturel et politique - faut passer à une logique quantique, càd annuler l’Atlantique.
a.       Le renversement dialectique
Pendant longtemps on a réfléchit sur ce que l’AmLa devait à l’Europe – dette à tout point de vus (langue, culture..), et beaucoup d’Européens pensent de la sorte. Depuis les années 1950 on a tendance à envisager l’autre versant de la dialectique : est-ce que l’Europe ne serait pas tributaire de l’Am ? C’est certain pour l’Amérique du Nord, mais la question se pose aussi pour l’Amérique du Sud.
Pionner : Gernan Arsingnegas, l’Amérique en Europe, traduit en anglais ; a proposé de débaptiser l’AmLa en Am ladine (cf : plus haut), et dans son livre nous dit que l’Europe doit beaucoup à l’Amérique mais pas seulement en matière première (tomate, chocolat, les haricots…), mais avant tout ses grands mythes littéraires et civilisationnels. Sans l’Amérique, il n’y aurait pas eu Don Quichotte (serait Colombien – p 5 et 15 : signaux qui mettent avant le fait que Don Quichotte est un gars qui s’appelle Quesadas – conquistador de la Colombie, personnage historique). L’Amérique a aussi donné beaucoup d’utopies (l’Eldorado, Lancaster qui essaie d’installer le système d’éducation mutuelle, le voyage en Icarie…) – a toujours fait rêver l’Europe. Arsingnegas : l’Amérique c’est aussi le continent de la liberté, Saint Domingue et Haïti : 1ère république noire au monde, est une république américaine.
è En réalité l’Amérique vous a donné les grandes utopies et vous a précédé dans le chemin de la liberté et des républiques modernes.
Cette opinion date des années 50, et n’aura pas beaucoup d’échos, le seul qui reprend ces idées est Che Guevara. Arciniegas redonnait fierté à l’Amérique, et reniait le fait que c’est une « enfant ».
Serge Gruzinski, historien de l’AmLa (le meilleur ; Les 4 parties du Monde, la Pensée Métisse, la colonisation de l’imaginaire…). Idée : on a toujours eu tort de penser que l’Am était une périphérie lointaine de l’Europe, c’est peut-être le centre du monde. Son livre les 4 parties du modne : image du journal de Chimalpain, écrit en aztèque, commente l’actualité française (assassinat d’Henri IV, que va devenir la France), page suivante : des japonais qui viennent à Mexico. C’est un mexciain qui écrit dans sa langue, en 1674 à Mexico (la plus grande du monde à l’époque, 1 million d’hab) commente la France, le Japon…
Nous défaire de nos raisons théologiques (partent du présent vers le passé), nous projetons sur les anciens empires coloniaux l’image que nous avions au XIXe. L’Empire colonial portugais et espagnol au XIVe : asymétrie – avec un empire immense pour une petite métropole. Au Mexique, 20 millions à 7,5 millions d’habitants en 1674 – liés au choc microbien.
Marguerita Suarez - Lima au XVIIe, plus riche que Cadix/Séville, et contrôle les deux, notamment grâce aux minerais (richesse).
è Phénomène d’américanisation du monde : à partir du XVIe, l’Amérique influence l’Europe plutôt que l’inverse.
Ex :
-          La science métallurgique européenne vient en grande partie d’Amérique. Un tiers des conquistadors sont allemands, qui sont admiratifs devant leur technique : ils arrivaient à fondre le platine, et ils apprennent à mieux fondre le cuivre… Ces techniques reviennent en Europe.
-          C’est vrai également dans le domaine de la médecine, plantes médicinales – savoirs qui reviennent en Europe.
-          Idem pour la musique : les rythme du XVIe – la chacone (vice-roi du Pérou), et la sarabande (afro-péruvienne).
-          Les arts : perspectives à maniérisme
-          Utopies politiques….
Gruzinski  réfléchit sur le XVIe – Europe tributaire de l’Amérique d’une manière que nous ne soupçonnions pas. Mais on peut aussi étendre la réflexion sur le XIXe et le XXe… Alors que l’on a tendance à croire que c’est l’inverse.

b.      Comment penser l’Euramérique ?
Nous devons des choses à l’Amérique Ibérique (ce n’est pas qu’un rêve d’Amérique du Nord) ; l’article d’Olivier Compagnon, sur le concept d’Euramérique au XXe (lecture obligatoire) : pendant très longtemps les Européens ont parlé d’influence de l’Europe sur l’Amérique, le mot « influence » date du XIXe s (très en vogue sous Nap III – prolongement de la France – Equateur demande par deux fois à devenir français). Cette idée habite encore le cerveau d’ambassadeurs européens ; parce que « influence » suppose une hiérarchie, on n’en est plus là.
Il n’y a pas eu influence, mais dans la mesure où l’Amérique Latine, et l’Europe c’était la même communauté de civilisation, il a eu une forte tentation pour les latinos américains de trouver des recettes en Europe. Puisque nous sommes la même chose, si une recette marche à Paris, pourquoi ne marcherait-elle pas à Bogotà. Paradigme des modèles. Article de Frédéric Martinez, sur l’action de Gilibert en Colombie qui a organisé la police à Paris a essayé de faire de même en Colombie – échec.
3e paradigme d’interprétation : les transferts culturels. L’idée des historiens, justement parce que l’AmLa et l’Europe c’est un même monde du point de vue des élites au XVIIe, il faut transférer en terme de transferts mutuels ; il faut raisonner en mode plus quantique càd que nous savons auj que l’Europe et l’AmLa s’influencent mutuellement parce qu’elles participent d’un même genre, d’une même communauté de civilisation. Ex : Italie et Venezuela depuis 1930.
è Le mot « influence » est banni (renvoie à l’impérialisme), on parle de transferts culturels et politiques.

Chapitre 1 L’Euramérique (Postulat)

Section 1 De la difficulté de l’objet – L’Amérique hispanique : une singularité modernité ?

Intro : André Siegfried, 1934, spécialiste d’Amérique Latine d’avant-guerre (directeur de Science Po Paris), Amérique Latine (google books) : pour l’Amérique du Nord nous avons Tocqueville, mais qui avons-nous pour comprendre l’Amérique Latine ? Personne, déficit grave qui explique peut-être pourquoi on oublie souvent l’Amérique Latine est oublié en sciences politiques.
A l’époque le livre le plus lu par les élèves de science po est le livre de James Bryce (énorme 2 vol), 1921 : les républiques ne figurent dans aucun des volumes, parle de démocraties donc pas d’Am du Sud ; parce que les constitutions sud-américaines n’assurent pas aux citoyens des libertés véritables (ne sont pas des vraies constitutions) [britannique] – « républiques de nom, mais dictatures de fait », ne pas confondre la forme et l’esprit. Les régimes sud-américains oscillent toujours en anarchie et tyrannie, donc pas une démocratie. En 1921 : n’a pas connu les grands populismes.
Siegfried répond : c’est un scandale d’avoir exclues l’Amérique Latine, d’autant plus qu’il faut se poser la question sur notre propre gouvernement en France… (sommes-nous meilleurs ?) ; Bryce aurait dû faire preuve de plus d’indulgence envers la « Cité néo-latine » (Siegfried) càd le monde latin (France, Ita, Espagne et Amérique du Sud).
Bryce est condescendant, et rate la parenté du politique dans le monde latin (il y a une façon politique dans ce monde).
3 idées essentielles :
·         On ne peut pas mettre à distance les républiques latino-américaines parce que :c’est le laboratoire de la république et de la nation au XIXe (plus que l’Amérique du Nord – Aron : Am du Nord déçoit la France) ; et la France s’en inspire
·         Très forte parenté entre les pays latins d’Europe et l’AmLa ; une sympathie et donc nous allons être obligé de penser le politique en mettant ensemble l’AmLA, l’Espagne, la France et l’Italie ; on n’a pas le droit de diviser l’objet.
·         On cherchera si effectivement il n’y a pas eu un autre Tocqueville – peut-être que si.

I.                    Les avatars de nos représentations

A.      Du mépris à la prudence

a.       Le mépris pour l’immaturité des Latinos-américains
Hegel : une humanité dans l’enfance ; les vertus et les vices de son ingénuité – pas du côté de l’idée, mais du corps.
Le problème, Hegel n’est pas le seul à penser ceci, et beaucoup de récits de voyages reprennent ces idées (à de très rares exceptions) : discours des républiques latino-américaines sont « mort-nés ». Ces voyageurs reprennent des arguments chez Buffon qui a été méchant avec les latino-américains qui considérait aussi qu’ils étaient dans l’enfance. D’autres auteurs adoptent la théorie des climats de Montesquieu : parce que climat tropical, il a les pores qui se dilatent, et l’inhalation est moindre et se dirige vers le hamac plutôt que le bureau…
Les comparent toujours aux créoles de l’Amérique du Nord qui sont vertus, travailleurs… C’est un Américain qui correspondait mieux à ce qu’un français/anglais pensait d’une humanité heureuse.
La plupart des voyageurs sont monarchiques et donc un apriori anti-républicain, et noircissent le tableau ; souvent protestants et donc noircissent le tableau parce que c’est un monde catholique, superstitieux, oisif…
A priori de l’immaturité, du chaos, de la superstition – a priori similaires sur l’Espagne.

b.      La sympathie pour la « Cité néo-latine »
Cité néo-latine* : expression de Siegfried, auteurs des années 20 vont plus loin, comme Marius André qui est très engagé sur le plan politique (proche de Charles Maurras), et suggère à l’époque c’est qu’il y a communauté de civilisation entre Espagne, Italie, France et Amérique Latine. Il traduit le Césarisme démocratique (livre de 1911, de Lance) qui sera le livre de chevet de Mussolini. Registre complexe. Mussolini voit dans cette pensée latine quelque chose d’intéressant – le duce italien est comparable à un libertador américain.
Mérpis qui s’efface mais est capté par des idéologies de 3e voies soit le réactionnisme (Maurras) soit fascisme.

c.       Après-Guerre : condescendance et anathèmes
Aime l’Am LA mais la traite avec condescendance (Sartre) et d’autres la condamne (Debré – origine de la mort du Che).
Condescendance* : effectivement les républiques latino-américaines ne sont pas démocratiques, elles ressemblent trop aux rép de l’antiquité, elles sont pour la liberté des anciens, pas des modernes. Logique romaine, antique ; pas dans une logique moderne (alternance, partis).
Anathème* : confiscation du pouvoir par les oligarchies, et même si alternance ce sera à l’intérieur de ces oligarchie. Elite qui se perpétue à l’infinie (idée des FARCS).
Ce discours entre les deux ; et Debré : l’Am La ne s’en sortira que par la révolution.

d.      Plus récemment : prudence interprétative et retour de l’empirisme
Notre vision a évolué, ce qui est frappant dans les spécialistes aujourd’hui c’est une extrême prudence, comme un aveu d’impuissance.
On a du mal aujourd’hui à s’y retrouver, complexité latino-américaine qui est souvent incompréhensible pour les Européens, et donc appelle à la prudence.
En France, Observatoire Géopolitique de l’Amérique Latine dirigé par Olivier Dabenne (antenne Sc Po Paris à Poitiers), Yvon De Bot, Olivier Compagnon, Gilles Bataillon.
Hypothèse : si on a été aussi longtemps méprisant, c’est parce que pendant longtemps nous avons cru au progrès ; mais aujourd’hui tous les grands récits sont parterre (Dieu est mort, Marx est mort, Freud est mort, le travail est mort…). Alors qu’en AmLa ces récits sont encore vivants, peut-être que c’est du fait de ces récits que l’AmLa peut juger l’Europe qui est en retard. Inversion des discours.

B.      La dénégation de la de la Modernité…
Repose sur l’image que l’on se fait en Europe de la Modernité.
a.       Qu’entend-on par le Modernité ?

La Modernité*(Liotard)
·         Modernité = représentation ; càd que désormais on a inventé l’individu autonome et qu’il va pouvoir ne pas être tout en même temps (un soldat nous représente sur le champs de bataille, un député nous représente dans l’assemblée). On va se faire représenter. Idée de représentation comme fondatrice de la modernité. Dans une société antique, la logique est holiste par conséquent l’individu n’existe pas. La modernité c’est l’invention de l’individu, quand les hommes sont égaux, l’ego-centrement de la société.
·         Modernité  = le désenchantement du monde, on n’a plus besoin de Dieu. Le Dieu est mort de Nietztch
·         On ne peut comprendre les réalités du monde que par l’économique ; depuis Smith, Richesses des nations, 1776. On ne peut comprendre le bonheur que par l’économie.
Si on est convaincu de ces trois postulats – nous sommes modernes. Les 3 éléments semblent liés ;

Post-modernité* : Jean-François Liotard : nos sociétés actuelles ne sont plus véritablement modernes. 3 traits de la post-modernité :
-           via les réseaux sociaux, on crée au quotidien des tribus (une classe, un groupe de musique…) à nous sommes post-moderne.
-          Notre génération et la précédente a re-bricolé la morale (statuette de Buddha, mange macro-biotique…) parce qu’une sorte d’inspiration sacrée qui n’arrive pas être assouvie. Dieu est mort, mais pas le sacré – c’est notre propre moral à post-modernité.
-          Déception en l’économique, on préfère croire dans l’ethnique et le culturel (retrouve l’homme naturel). Par le biais de ce 3e trait à renouveau des trois grandes religions avérées.

b.      En quoi l’Amérique hispanique ne serait-elle pas moderne ?
On l’a tellement méprisé au XIXe, parce que l’AmLA est davantage holiste qu’individualiste. Ce sont des sociétés d’interconnaissances. Ex : pb avec le fisc, le latino-am va à l’hôtel des impôts en famille ; et s’adresse au contrôleur en le tutoyant et en lui rappelant éventuellement un lien de parenté. On essaie d’inclure cette administration dans une sphère privée (même région, cousin commun…). Dynamique de l’interconnaissance – et donc notre liberté diminue parce que tous savent pour qui on vote, ce que l’on mange, ce que l’on fait… De ce fait on ne peut pas être moderne.
Le religieux : Dieu n’est pas exile en AmLa ; ils sont très croyants, et deviennent de plus en plus protestants (Guatemala, Chili, Equateur) - Change d’église. Deuxième moitié du XIXe, le Pape Pie IX et Léon XIII : reconquête spirituelle de l’AmLA, parce qu’au moment des guerres d’indépendance il y a eu une déchristianisation (Bolivar transforme les couvents en casernes). Les Jésuites reviennent en 1850 + ces deux papes pour faire de l’Am La de fer de lance de chrétienté jusqu’en 1914. AmLa : hauts et bas dans le catholicisme.
Aujourd’hui mouvement de néo-indianisation – l’indianisme : redevenir indiens (/ !\ pas indigènes). Mouvement très violent – au Pérou par un syndicat, et en Bolivie la présidence de la République. Ces néo-indiens ont tendance à ne plus tout à fait vouloir le catholicisme et le Dieu des chrétiens. Retour aux croyances ancestrales : la Pacha Mama (Terre –mère)
è L’AmLa n’est pas moderne : holiste, et croyante.
è Construction de l’Etat ? Nation ?
è Parce que nous sommes pré-modernité, nous sommes passés à la post-modernité avant vous.
On comprend mieux les méprises européennes surtout si on les juge à l’aune de la modernité, mais ne sont pas en retard si on les juge à l’aune de la post-modernité (métisse, nouvelles croyances..). Sujets qui passionnent les latino-américaines.

c.       Le piège des amalgames tiers-mondistes 
Le drame de l’AmLA c’est qu’elle a souvent était comparée à l’Afrique noire. Ce sont des pays qui ont 8000 ans d’histoires ; mais sont souvent considérés comme des pays seulement bons à être exploités. Dans les années 50, décolonisation, beaucoup d’intellectuels européens mettaient l’Afrique et l’Am La sur le même plan, et réfléchissait de la même manière. AmLa s’est décolonisée toute seule il y a deux cents ans, et à 8000 ans d’histoire alors que certains pays d’Afrique ont moins d’histoire.
Méprises typiques des années 50 qui donnent lieu à la sociologie de la dépendance, au mépris des réalités du pays. 

II.                  Une « singulière » modernité
Elle est moderne, mais différente de celle en Europe : modernité japonaise, modernité islamique.
A.      Deux postulats démontrables 

a.       L’Amérique hispanique ne doit pas être séparée de l’aire de civilisation occidentale
Quand les Européens (All, Port, Fra, Esp… Empereur européen : Charles Quint) arrivent en Amérique, et créent des villes avec un plan en damier comme les romains (Vitruve) : des villes de colonies. Les européens arrivent non pas pour exploiter l’Amérique mais pour créer des colonies de peuplement. Le mot « colonie » est absent au XVI, on parle des royaumes d’outre-mer, de l’Espagne d’outre-mer. Quand un conquistador arrive est dans une logique mimétique, si l’endroit ressemble au pays d’où il vient.
Peuplement : on plante du blé, on fait venir des cochons (pas musulmans) à recréer l’Espagne outre-mer et on vient avec tout le système civilisationnel sauf la vigne et l’olivier (monopole réservé à la péninsule – les créoles se vexent) ; on ne voulait pas qu’il y ait des imprimeries en Amérique.
La civilisation se transporte, et certains collègues parlent d’extrême-occident (Rouquier, Blaise Cendras en 1920) à pas d’atlantique.
Atlantique forte connexion et un accélérateur de relations pas un obstacle. Ex : coque en cuivre construite et inventé par les anglais qui repoussent les coquillages qui faisaient des trous dans la coque (bactéricide – détruit les bactéries) à aucun frottement, jusqu’à 30 nœuds sur l’atlantique – Caracas à 15 jours de Cadix (on mettait autant de temps d’un point à un autre sur le même continent).

Ethique et Politique - cours 5 et les autres (j'ai pas compté, faudra vous débrouiller)

Au XXe : période des fascismes – ils avaient une passion pour la grandeur. Pour Mussolini « fallait vivre dans une période de très grande tension idéale ». On retrouve ça dans les manifestations de rue, la politique vue comme une épopée, la vie vue comme théâtrale.
Ces exemples peuvent nous permettre de comprendre que l’autorité charismatique ne dure pas, contrairement aux autres types d’autorité. Elle est liée à un individu et ne se transmet pas – elle ne dure donc que ce que dure l’homme.
La perte de l’autorité charismatique peut être du également à l’effondrement de son charisme. Il est fondé sur une forme d’artifice (en plus de son caractère), notamment ses victoires. Souvent on lui obéit tant qu’il est victorieux (ex : Alexandre le Grand) ou qu’il a le pouvoir (Charles De Gaulle).
Néanmoins le charisme peut s’entretenir [Gracian (XVI-XVIIe)] ;
-          La raison : le plus récent
L’autorité rationnelle se développe avec l’âge moderne, dans des sociétés sécularisées (pas assises sur les religions) et dans les sociétés démocratiques des temps modernes. Dans cette autorité, le chef est un homme ordinaire : ce n’est ni un fils de prince (lignée), ni un homme charismatique.
On part du principe que nul individu n’est supérieur aux autres (malgré les inégalités) : tous sont capables de mener leur destin. Ils ne sont pas égaux en intelligence, en beauté, etc. mais ils sont tous capables de décider de leurs propres destins. Ex : choisir son conjoint, son métier, éduquer ses propres enfants…
Pb : pour diriger la société il faut un chef/des chefs puisque tout le monde ne peut pas diriger à la fois.
è Contradiction entre la capacité de tous de diriger et le fait qu’il faut un chef
è Réponse : chacun va diriger tour à tour ou alors tout le monde vote pour celui qui va diriger.
Naturellement il y a eu des démocraties dites totalitaires/jacobines/léninistes (Talmon) : les gouvernants disent qu’en principe les citoyens sont capables mais en réalité ne le sont pas, et le chef doit ainsi dire ce qui est bon pour eux ; on retire aux gens leur capacité de se gouverner par eux même (ex : l’Etat éduque vos enfants).
Donc on met à la tête du gouvernement un chef normal, menacé de renvoie s’il se comporte mal, perte de protection à la fin de son mandat.
Autorité rationnelle, parce que comme le disait Claude Lefort, la place du pouvoir est toujours vide dans une démocratie. Le siège est vide càd que celui qui s’installe sur le siège du gouvernant ne restera pas ; le siège ne lui appartient pas. Il est le locataire temporaire de ce siège = démocratie.
L’autorité rationnelle signifie que la reconnaissance de l’autorité est une démarche de la raison : j’obéis parce qu’il a été élu. Le gouvernement devient nécessaire en raison. Ce qui fait autorité ici, c’est la loi. C’était ainsi définit par Platon à la fin de sa vie, qu’aucun tyran n’acceptait de devenir sage – le grand homme supérieur n’existe pas ; finalement nous n’avons qu’à donner l’autorité à la loi, càd quelque chose d’impersonnelle, de rationnelle – l’Etat de droit : l’autorité rationnelle obéit à la loi, garantit par le Conseil Constit.
L’autorité rationnelle ne fonctionne que si les citoyens sont éduqués à minima. L’éducation, c’est la connaissance des mots qui remplace la violence, il faut faire en sorte que les individus connaissent les mots càd connaitre les relations entre les individus ; si on ne sait pas parler on tape.
Ccl : cette typologie de Weber est la meilleure pour l’instant.
Les déviances de l’autorité : davantage au XXe qu’avant, il y a une sorte de dégout de l’autorité qui s’installe et on finit par le rejeter.
L’autorité consiste à obtenir l’obéissance sans employer la force ; mais les humains, êtres imparfaits, un individu qui a du pouvoir peut mal l’utiliser notamment pour la violence. Si violence elle perd son statut d’autorité tout en continuant son chemin ; l’autorité peut également perpétuée par des voies mensongères ; celui qui a l’autorité peut abuser de son autorité càd profiter horriblement de la confiance que lui font les gens.
Distinction bonne et mauvaise autorité ? La seule chose qui légitime l’autorité c’est le consentement ; et donc il est difficile de les distinguer (consent mais tromper). Le consentement ne suffit donc pas. La finalité d’une bonne autorité : le bien de ceux qui obéissent. Donc comment repérer le Bien ? Il peut avoir consentement, mais pas le Bien.
Ex : les sectes – consentement mais certitude que le malheur est présenté comme le bonheur. L’histoire finit par trancher, après beaucoup de dégâts, ceux qui obéissaient se rendre compte.
è Avant que l’histoire ne tranche, le consentement s’exerce dans l’ignorance.
Donc comment l’autorité trompe ?
-          Elle peut se tromper elle-même
-          Elle peut abuser de la naïveté de ceux qui obéissent (les enfants principalement, ou les personnes naïves ou détruites par le malheur)
-          Elle utilise les ressorts de la psychologie 
-          Manipulation de façon à vicier les présupposés de l’obéissance par des raisonnements tordus
Exemples d’abus d’autorité :
·         Au nom de la science (le plus grave) : propositions universelles et catégoriques. Il n’y a pas de tolérance en science tant qu’il n’y a pas de remise en cause. La réalité scientifique est la même pour tout le monde. L’autorité scientifique est considérée comme absolue, à partir de là elle est utilisée par certains pour obtenir des consentements dans d’autres domaines ; il va être possible parfois de costumer des certitudes de foi en certitudes de science.
Expérience de Milgram : on a inventé une expérience pour mesurer la mémoire ; les scientifiques voulaient faire une expérience sur les dégâts d’une autorité abusive. Des étudiants recrutés dans un hôpital, reçus en blouse blanche, et on les installe à un bureau avec un autre étudiant en face. Lire une liste de mot, et celui en face va devoir la restituer. En cas d’erreur on lui demande de lui envoyer une décharge électrique. 20% des gens refusent dès le début, 80% continuent. En face : ce n’est pas un étudiant, et commence à se plaindre de la douleur. Et celui qui abat une manette est en train de faire le lien entre la mémoire et la douleur.
è Un individu x obéit à l’autorité scientifique ; 80% des individus font tout pour croire que l’autorité scientifique et l’autorité morale sont les mêmes.
è Le nazisme s’est appuyé sur des sciences dévoyées (ne sont plus des sciences mais se présentées comme telles).
Expérience diffusée à la télévision.

·         Abus d’autorité idéologique : asservie les individus de façon analogue à la celle de la science. Idéologie* : conception du monde achevée (s’occuper de toutes les dimensions de la vie)  - peuvent se fonder dans une religion (toute en ont la capacité), dans une science (les soviets – DIAMAT : matérialisme dialectique : tiré d’une science, qui fait semblant d’en être une).
Sacré ou objectif à les deux sont des conditions d’obéissance.
S’impose par des habitudes de penser, des préjugés – cela devient une sorte de sacré au fur et à mesure. Ainsi des peuples finissent pas croire que des choses sont vraies, juste parce qu’ils ont l’habitude de le penser.
RQ : il vaut mieux croire la réalité plutôt qu’une théorie qui dit le contraire ; mais beaucoup de disciples sont incapables d’esprit de critique, et agissent comme des automates (voient les crimes mais ne les admettent pas).
Autorité d’idéologie est dangereuse parce que durable (contraire du charisme). Les équipes qui se succèdent réinvestissent l’idéologie.
·         Culte de la personnalité : dénaturation du charisme. Faute faire par l’autorité charismatique, la personne est divinisée, elle est rendue plus grande que nature (plus qu’un humain) et traité comme telle. C’est un excès pervers de la reconnaissance. Personnages qui se transforment en idoles de chair – c’est un moyen commode pour manipuler la population. (Ex : Ceausescu avait des sosies dans le pays pour démontrer son ubiquité).
Une population peu scolarisée  croit.
A l’âge des masses, les idoles sont plus nombreuses. Phénomène que l’on repère à une sorte d’emphase ridicule qui accompagne le chef (ex : agenouillement devant les Eva Peron en Argentine – divinisé : on ne s’agenouille que devant les Dieux).
Autorité tellement totale, que malgré la terreur, le chef est vénéré. La plupart des gens pensent que si toute la terreur existe c’est que le chef est n’est pas au courant, que ce sont ses mauvais sbires qui répandent la terreur.
Servitude volontaire (existe toujours) : comment des peuples se plient si facilement à l’autorité excessive ? Plaisir d’obéir à de mauvaises autorités ?
1e explication : Dans l’antiquité, les grecs qui vivaient en démocratie ne comprenaient pas pourquoi là y avait des formes de pouvoir arbitraire, les gens obéissaient quand même. Pour eux : les orientaux étaient contents d’obéir, et c’était une question de gènes. Cette idée de « race obéissante » a traversé les siècles - de Strabon (Antiquité) à Custine au XIXe : les russes sont « ivres d’esclavage » - c’est leur nature.
2e explication : par le climat. Quand on vit dans un climat chaud on aime la servitude, parce que dans les pays chauds on n’a pas envie de bouger, et donc beaucoup plus dociles. Montesquieu : le chaud rend paresseux et donc docile, alors que le froid aiguise le courage et l’activité à les pays du nord : sont les premiers à être des pays libres (c’est vrai).
3e explication : La Boétie, Contr’un : comment se fait-il que toute la société obéisse à un seul individu – il faudrait un esprit de soumission alors que la liberté est naturelle à l’homme. La liberté est louée, pas la servitude : on réclame la liberté, personne ne réclame la servitude. Ce livre a été repris au XXe avec des textes de Simone Weil (philosophe), réunis sous le titre « Oppression et Liberté ». Ils pensent qu’un peuple peut s’endormir dans l’oppression : trouver une place confortable dans l’oppression. Il est possible que l’oppression apporte quelques avantages – ex : après la chute du mur, notamment en Bulgarie : on ne peut pas revenir au communisme pour des raisons idéologiques alors même que nous étions plus heureux – il n’y avait pas de chômage, paresse agréable, pas peur de l’avenir : le peu qu’ils avaient était assuré pour toujours.
4e explication : Steiner et Thomas Mann – ils disent qu’il y a une sorte de dégénérescence de la culture de la liberté : on finit par ne plus savoir ce qu’est la liberté à force de la voir sans la regarder. Un bienfait que l’on a tout le temps et que l’on finit par ne plus connaitre la signification. On ne la goute plus, on l’oublie, et on ne s’en sert plus (on ne connait plus ses avantages).
5e explication : concept par Gustave Lebon, Psychologie des foules  - la propagande politique : autorité artificielle qui peut s’organiser d’autant plus facile que l’on constitue le peuple en foule. Un peuple et une foule ce n’est pas pareil. Un peuple : ensemble de gens réunis dans des groupes étant en lien les uns avec les autres –société est tissée de relations de connaissances et de réciprocité.
Si on constitue le peuple en foule : il est plus facile de les faire obéir. Diviser pour régner : la foule sépare les gens de leur groupe d’appartenance. Dans une foule, l’individu va perdre ses caractères habituels, la vie consciente à tendance à s’effacer. L’individu plongé dans la foule se sent puissant  et irresponsable ; puissant parce qu’il fait partie d’une foule (chacun a peu de force mais pas la foule) et irresponsable (parce que la foule est un tout, on ne l’individualise pas).  Par ailleurs l’individu dans la foule est influençable parce que la raison s’écarte, il est la proie de ses sentiments et de ses émotions (cris, slogan, gestes), par conséquent le meneur de foule saisit les gens pour les faire commettre des actes qui en temps ordinaires ils n’auraient pas commis. Le meneur a compris comment réagit la foule, il la sent. Lebon explique qu’avec l’âge des foules, cette manière de mener les foules est devenue presque technique : pour emmener une foule il faut affirmer et répéter à commettre un acte précis : piller, tuer, se faire tuer. Idées simples transformées en slogans et affirmations.
Dans Mein Kampf, dernier chapitre sur la propagande : seule technique qu’il connaissait bien. Il brosse un portrait de l’homme qui se trouve dans la foule : paresseux, affectif, passionné, bourré de préjugé (la moindre rumeur l’emporte). Hitler met en place une théorie de la propagande expliquant à ceux qui vont faire de la politique avec lui, et ceux qui vont parler dans les salles : comment il faut faire pour que les gens écoutent et soient d’accord. Ne jamais parler le matin (en pleine forme) parce que c’est là où l’on a le plus de libre arbitre. Il ne s’agit pas de convaincre mais de s’introduire dans l’esprit – se produire dans des foules les plus importantes possibles. Choisir les moments et l’auditoire : on n’utilise pas les mêmes expressions selon les auditoires. C’est ainsi que l’autorité devient une puissance dangereuse.
Comment éviter ça ? Développer l’esprit critique ; il ne faut pas se dire qu’il faut chercher le bon gouvernant, la seule solution est de développer critique chez les peuples via l’éducation, càd la famille et l’école (les deux réunis) ; il faut avoir quelque chose à critique : la culture. Se réfléchir et réfléchir dans ses pensées ! L’esprit critique n’existe que s’il n’y a pas qu’un seul discours imposé – pour être libre de penser.
Il y a des conditions chez le peuple lui-même pour éviter ces excès :
-          Il faut un niveau de confort matériel : un peuple affamé est une proie facile
-          Niveau intellectuel : apprentissage de l’esprit critique qui passe par la connaissance des mots
-          Niveau de conscience morale : s’apprend dans la famille et à l’école. Il faut des critères éthiques pour juger une autorité.
6e explication : Il existe aussi une autorité occulte : celle de la contrainte sociale ; quelque chose qui ne se dit pas mais qui existe partout (à différent degrés). Les idées passent, se diffusent d’un groupe à l’autre et engendrent des comportements. Idées véhiculées par tout le monde. Dans les sociétés de masse on a tendance à assimiler la répétition à la vérité ; on a tendance à identifier un personnage connu à un personnage reconnu. Les époques médiatiques de masse sont abandonnés aux opinions les plus répétées, et s’y soumet de manière mystérieuse. Il y a une opinion dominante mais il faut en avoir conscience pour développer son esprit critique. La mode des idées est pesante.
Question de la psychologie de l’autorité : cette relation entre l’autorité et celui qui obéit est autoritaire, hiérarchique et donc exclue l’amitié (relation d’égalité). L’homme d’autorité n’est pas un autoritaire sauf si on fait dériver le langage ; l’autoritaire ne parvient pas à avoir de l’autorité alors qu’il l’a veut, c’est celui qui singe l’autorité, et a donc un comportement parodique.
Mounier écrivait « l’autoritarisme est un gout de faible… » : intimidation frauduleuse.
Psychologie qui a l’autorité : le véritable chef n’est pas quelqu’un de narcissique ou de mesquin, il est identifié à une œuvre collective. Entre l’autoritaire et l’homme d’autorité : l’autoritaire est pointilleux, méticuleux, alors que l’homme d’autorité ne s’enferme pas dans le détail, et cherche à préserver la distance entre lui et ceux qui obéissent (il est seul – et donc pas heureux).
Le chef est malheureux : la gloire, fruit de l’autorité, est le deuil éclatant du bonheur. L’homme d’autorité doit préserver la distance : « nul n’est grand homme pour son valet de chambre » ; le chef s’entoure de mystère sinon il égare son prestige. Gracian : il faut se rendre impénétrable sur l’étendue de ses capacités. Il étonne et n’est pas étonné. Ne confie pas sa vie privée pour éviter la fragilité. Ne pleure pas sur ses malheurs, ne se plaint pas. Le chef n’est pas plus grand que les autres, néanmoins il doit faire comme-ci il était plus grand. Il se nourrit de l’admiration qu’on lui porte ; il va donc s’entourer de mystère parce qu’il sait que les mots trahissent.
Le processus de la perte de l’autorité : dans la dialectique du maitre et de l’esclave analysé par deux grands auteurs : Platon et Hegel. C’est la démonstration du passage par lequel le maitre devient esclave, et l’esclave devient maitre. Le maitre a cessé d’avoir toutes les qualités ci-dessus (distance, énergie, mystère) ; Platon : le maitre et l’esclave en temps de guerre, après la bataille, le maitre est gros, souffle, sue et se plaint ; tandis que l’esclave est fort, se tait, et ne se plaint pas.
I.                    L’opinion publique
Stoetzel : l'opinion publique* est un sentiment dominant au sein d'une communauté sociale, qui est accompagnée plus ou moins clairement de l'impression que ce sentiment est commun.
Il y a donc l'idée de convergence des appréciations, l'impression que nous sommes très largement d'accord sur quelque chose que nous appelons une idée, une conviction, ou autrement dit un sentiment.
Il faut ajouter l'idée que l'opinion publique exerce une pression, il est difficile d'avoir une opinion inverse, ainsi l'opinion générale impose une puissance. Il est difficile d'être seul contre tous d'où cette puissance, cela tient au fait que les individus aiment appartenir à un groupe et détestent en sortir.
En outre, l'opinion publique n'est pas quelque chose de scientifique, dans la mesure où une affirmation scientifique n'est pas une opinion. En cela, elle se distingue de l'information qui révèle un fait.
è On parle d'opinion publique non seulement par ce qu'elle est partagée par un nombre important, mais aussi par ce qu'elle s'impose, ce qui permet ainsi de comprendre un certain nombre de choses qui se passe dans la société.
Il ne faut pas confondre opinion et consensus.
Le consensus* est un accord silencieux et spontané, concernant un certain nombre de règles générale de la société, sur lesquelles le corps social est silencieusement, spontanément d'accord. Une société ne peut pas vivre sans un minimum de consensus, en cela il en devient essentiel.
Bien que le consensus ne soit jamais totalement unanime, mais il s'agit d'une adhésion qui est largement étendu sur la société telle qu'elle est. Toutefois cela ne veut pas dire que le consensus ne peut pas changer, qu'il ne peut être remis en cause et être au cœur des débats pour amener de nouvelles bases.
L'opinion publique* à l'inverse du consensus, n'est pas silencieuse, elle est quelque chose dont on parle et qui traverse des courants de pensées, elle s'exprime à travers des groupes qui constituent des forces qui ne sont d'ailleurs pas forcément majoritaires.
Ce qu'on appelle aujourd'hui le consensus pourrait renvoyer à ce que les anciens qualifiaient d'esprit public (17é s.) il est devenu opinion publique au XIXe. C’est le fruit d'une transformation politique à travers le passage de l'aristocratie à la démocratie. Peu à peu grâce à un certains nombres de réformes le pouvoir de l'élite va devenir le pouvoir de la masse (2 siècles jusqu'à ce que les femmes soient intégrées après la 2GM).
Cela sera aussi permis par le développement des moyens de communication (pendant 2 siècles : début XIXe/XXe), apparition de la publicité à la charnière de ces deux siècles, le développement de la presse (19é s.), développement des journaux bons marchés, des moyens de communication qui ne vont pas cesser de se développer jusqu'à la révolution informatique. C'est ce développement exponentiel qui permet l’apparition des courants d'opinions.
Il apparaît des sentiments de masses qui sont plus ou moins dictés, modelés par l'information de masse. Autrement dit, ce que l'on savait de l'esprit public va devenir de plus en plus important, en raison du régime démocratique, et de la technique, tout le monde pouvant accéder en permanence à l'opinion générale.
L'esprit public avait déjà été défini dans L'Esprit des Lois de Montesquieu au XVIIIe ; en effet il provient des groupes religieux, politiques, culturels. Par conséquent, l'esprit public est l'esprit français par ce que nous sommes en France ou encore l'accord tacite de tous les FR sur l'ensemble des mœurs de la société, une sorte de consensus national. Au XVIIIe on voit apparaître cette idée de consensus et d'opinion publique, opinion publique* capable de détruire le consensus. On va donc voir apparaître des courants d'opinions qui forment des partis, et des luttes pour ou contre le consensus (révolution FR).
C'est dans cet ordre d'idée que l'on peut comprendre Rousseau et la distinction entre la volonté générale et la volonté de tous.
·         La volonté générale* est ce qui constitue la société en vue de l'intérêt commun.
·         En revanche, la volonté de tous* est la volonté (particulière) des groupes additionnés, soit la volonté de tel parti puis de tel autre par exemple etc. ce sont des volontés particulières (intérêts particuliers) additionnées.
Distinction entre le collectif et la communauté.
·         Une communauté* va au-dessus des particularités. L'esprit public renvoie au sentiment de la communauté, l'esprit qui parvient à surmonter les particularités.
è L'avènement de la démocratie et des moyens de communication ont marqué l'avènement des masses, et de l'opinion publique qui l'accompagne.
Cela a été décrit par Tocqueville dans De la démocratie en Amérique. Il explique que dans la démocratie nous sommes tous égaux et au nom de cette égalité, nous écoutons le jugement du public, bien plus que celui du savant (l'être de raison).
è La foi dans l'opinion commune deviendra religion.
L'opinion publique ne gouverne pas seulement en démocratie, elle a un poids énorme dans les régimes autocratiques (totalitarismes, dictatures, etc.). Dans ces régimes, le pouvoir s'appuie aussi sur l'opinion, dans ces cas-là le chef fabrique l'opinion, c'est là l'idéologie des gouvernants qui fabrique la volonté des peuples.
Même dans les régimes autocratiques, le pouvoir gouverne seul, mais il doit fabriquer une opinion, il ne peut la laisser se faire toute seule ; une opinion divergente ne peut s'exprimer. Développement de Ministères de l'information qui contrôle l'information (ex : suppression des imprimeries privées), ce qui conduit aux délits d'opinions, lorsqu'on commence à dire qu'il y a trouble à l'opinion public en cas d'expression d'une position divergente.
On s'aperçoit que les dictateurs travaillent beaucoup avec le peuple, cela s'explique par le fait que ces-derniers détestent les élites et l'aristocratie. Les dictateurs se font élire par les peuples, par ce qu'on sait que ces derniers vont abolir les aristocraties, les sociétés dictatoriales sont centralisées à l'inverse des sociétés types féodales. D'une manière générale, les tyrans sont mis en place par des peuples, consentants (idées simples) et subjugués (charisme).
Les dictateurs arrivent au pouvoir par des referendums plébiscites, l'opinion est un peu forcée, parfois plus qu'un peu. L'autocrate va gouverner en maintenant à sa botte l'opinion publique par des discours, des rassemblements, en essayant de faire passer le courant entre lui et le peuple de manière directe sans passer par l'aristocratie, il usera de démagogie, à travers un programme ambitieux du point de vue social.
Lorsque l'opinion est réduite du fait de la délation, l'opinion va réapparaitre par des canaux officieux  (atteste le fait que personne ne peut se passer de l'opinion) ; cela passe par le bouche à oreille, les réunions secrètes (universités volantes dans les caves par exemple), la prise de risque pour la liberté d'opinion (exemple de la Rose blanche). Il y a une volonté naturelle à l'humain d'avoir une opinion à soi lorsque le pouvoir vous en impose une. Il y a des difficultés, il faut du courage et néanmoins cela existe toujours à chaque époque, tout est prétexte pour que cela réapparaisse, aussi, est-il difficile pour un pouvoir de ne gouverner que sur la terreur. C'est ainsi que le philosophe Alain écrivait : « Les problèmes politiques sont impénétrables, la force gouverne, mais l'opinion domine, nul pouvoir n'a osé braver l'opinion ».
L'opinion est une expression de la maitrise c’est en cela qu'elle a du pouvoir, plus sournois et plus ambiguë que le pouvoir lui-même, s'exerçant par la pensée, sans persuasion de manière générale, une sorte de pouvoir par la répétition. Il y a une maitrise de l'opinion dominante, lorsqu'elle se répète elle finit par assujettir. Les individus sont très sensibles aux arguments qui courent, avec le sentiment que la répétition rend les arguments vrais et indéniables.
è C'est ainsi que les pouvoirs forts/autocratiques se sont emparés de cela à leur propre profit. Si quelqu'un veut prendre le pouvoir il commence par acheter la presse. « Acheter la presse et vous serez maître du pays » Franc-Maçon.
Aujourd'hui, la technique déborde la surveillance, avec un flow d'analyses qui empêchent que nous interdisions quoique ce soit et qui empêchent la dictature des sociétés d'opinions. On s'aperçoit qu'il est difficile de limiter la connaissance des gens. Il y a un certains nombres de drames qui ont été cachés pendant longtemps, on s'aperçoit que la force de la transparence est de plus en plus grande avec les moyens techniques.
Par ailleurs, le développement de la presse et de l'informatique, fait en sorte que le nombre d'opinions développées peut finir par développer une mode, où les journalistes répètent les uns sur les autres : « nous n'avons pas une censure de la presse, mais une censure par la presse » nous ne pouvons pas lire quelque chose qui aille contre l'opinion publique.
L'opinion publique se fonde sur le sentiment et l'émotion, tout le problème de la démocratie qui se fonde sur l'opinion publique, alors que les décisions politiques réclament des décisions à long terme, c'est à dire qu'un dirigeant politique ne peut prendre ses décisions en ne suivant que l'opinion, difficile car tous gouvernements veut être aimé de l'opinion. C'est pourquoi la tentation est forte d'être dans la démagogie, car aucun chef ne souhaite être impopulaire. Par ailleurs, l'opinion publique se fonde sur l'émotion, car d'une manière générale elle se retrouve dans des foules. Or une foule est en soi dangereuse.
Les premières foules* dont nous avons connaissance dans les cultures européennes, sont la foule d'Homer dans l’Iliade, plusieurs milliers de guerriers réunis, avec le Roi des rois Agamemnon qui est en train de plaider la guerre de Troie. Il donne à lire la description de la foule :
·         elle change d'avis facilement, sans cesse, mais elle est toujours sincère, une sincérité successive, d'où la dangerosité
·         L'irresponsabilité caractérise particulièrement les foules, qui ne disposent pas d'autocritique
·         Une espèce d'incapacité à raisonner,
·         Elle n'a pas de mémoire, elle peut encenser une figurer pour aussitôt l’envoyer à la mort
L'opinion que l'on trouve dans la foule a besoin d'être instruite, en cela plus elle sera instruite plus elle pourra faire usage de la raison. Cela est fragile, car on va s'apercevoir lorsque des gens instruits sont ensembles, ils perdent leur instruction.
Marc Orel pointe un paradoxe, l'éducation de l'opinion publique est un endoctrinement, on ne peut instruire une foule, on n'instruit que des individus. Si on veut avoir un raisonnement et apporter une argumentation à quelqu’un on peut le faire à un petit groupe avec qui il est facile de discuter et d'argumenter. Face à une foule les arguments deviennent assertions, ils en deviennent pauvres. Il y a une sorte de paradoxe dans le rapport à l'opinion publique qu'il faut respecter si on est démocrate, mais la respecter est mettre en avant l'émotion qui est quelque chose de primaire, et qui requiert d'être mise en cause. Le seul moyen que l'on est trouvé pour contrecarré cela est faire en sorte qu'un peuple soit pris en petits groupes et non en foule pour préserver leur raison.
è La réponse à ce paradoxe de l'opinion est donc la décentralisation.

II.                  La propagande politique
La propagande politique se développe à l'âge des masses. Ce phénomène a été relativement bien décrit par Ontefa Y Fasset.
Au XXe, la propagande politique va trouver des théories et des applications vertigineuses, elle en deviendra une véritable science, ce qui va naturellement permettre à des régimes totalitaires et dictatoriaux de s'installer. Cette propagande n'est rendue possible que parce-que les individus sont regroupés en foule, les moyens de transports d'informations étant désormais rendus possibles.
En outre, les individus qui apparaissent dans ces foules, sont d'avantages solitaires et moins liées à leur communauté qu'autrefois.
-          Lorsque des individus sont physiquement ensemble, c’est une foule,
-          lorsqu'ils sont devant une TV par exemple, ils sont éparpillés et forment donc une masse
L'étude de ces comportements devient une branche de la psychologie sociale, dont on tire des lois, comment influencer cette masse de manière à lui faire faire ce qu'on veut, avec un certain nombre de recettes pour mieux tromper le peuple. C'est ainsi qu'apparaissent en même temps un certains nombres d'affirmations morales sur la tenue de ces études. On va alors se demander :
-          si ces régimes qui emploient ces méthodes sont valables,
-          si traiter l'homme dans une foule ne revient pas à l'amenuiser,
-          comment peut-on juger le monde moderne qui utilise la psychologie des foules pour gouverner,
Il se produira au cours du XXe un changement d'opinions général sur ce qu'on appelle le peuple qui va devenir une masse. Selon Michelet,
·         un peuple* est un ensemble de gens qui raisonnent, discutent entre eux, ont des opinions et non des vagues émotions qui passent. Ce peuple dont qu'il évoque et pour lequel il a une forte admiration est le peuple de la démocratie qui vote et qui est un groupe de citoyens.  
·         En revanche, ce qu'on appelle la foule* et la masse*, sont les mêmes individus qui au fond ne fonctionnent pas de la même façon, ils ne sont plus inscrits dans leur groupe et ils vont réfléchir à coup d'émotions, au moment. Ainsi d'une certaine manière ils vont perdre leur raison.
Toute une théorie va alors voir le jour, où le comportement des humains varie selon qu'on se trouve dans un petit groupe ou dans un groupe très vaste.
Elle dit que certaines capacités humaines ne peuvent s'exercer qu'individuellement, car elles ne peuvent s'exercer que dans un certain recueillement, il faut entrer en soi même pour être capable d'exercer ces capacités que nous avons en nous.
è Par conséquent, un homme seul va être capable de juguler et refreiner des passions, tandis que si on lui insuffle la colère dans la foule, il va être pris dans une sorte de tourbillon où seuls les phénomènes de la surface* ressortent (la passion, l'excitation, la colère) à la différence des phénomènes de profondeurs* (réflexion, critiques, raison).
En cas de prise de décision, une dialectique se joue entre la surface et la profondeur, il arrive bien souvent que lorsque nous sommes au milieu d'une foule nous prenions une décision, et une fois le recul pris on s'en détourne. Au fond nous sommes capables d'être nous-même lorsque nous prenons un temps de silence. Il ne faut jamais prendre de décisions importantes au sein d'un groupe.
On s'aperçoit ainsi de l'usage dont usent certains pouvoirs pour maintenir les individus à l'état de masse, pour nous empêcher de rentrer en nous-même et de nous poser les vraies questions. Celui qui sort de la manifestation de masse, retrouve la répétition dans la rue avec la transmission du discours du chef, la photo du chef etc. Ainsi pour maintenir les hommes en « masse » il y a des « trucs » (moyens techniques) pour agglutiner ces individus de sorte qu'ils soient toujours ensembles.
Les modernes se sont rendus compte que l'on pouvait facilement tromper les foules. Le premier livre sur la question G. LEBON. Il expliquait que la foule avait une âme collective, l'âme de la foule, essayant de comprendre comment l'individu changeait lorsqu'il était dans la foule. Il soulève trois points importants :  
·         Dans la foule l'individu sent qu'il est puissant, par conséquent celui qui ressent qu'il est puissant va cesser de refreiner ses instincts.
·         Dans la foule, l'individu est irresponsable, il n'y a pas de responsabilité collective (elle n'existe pas). Toutefois il existe que nous puissions nous sentir obliger d'assumer les fautes des gens qui appartiennent à un groupe auquel nous sommes affiliés.
·         Dans la foule, il se produit toujours un phénomène de contagion. Il est paralysé dans la mesure où ses capacités de raisonnement ne sont plus les mêmes que lorsqu'il était seul, l'inconscient prend le dessus, il est comme hypnotisé. Une foule peut être littéralement hypnotisée et paralysée par celui qui lui parle, s'en suivra un effet de contagion, où les foules deviendront serviles.

Les individus se transforment lorsqu'ils sont en foules prenant des décisions qu'ils n'auraient jamais prises si ils n'avaient été que quelques un(e)s (c'est ainsi que les citoyens d'Athènes avaient condamnés les décideurs d'Arginuses). On peut donc dire que la foule est déraisonnable, elle répond à des impulsions impérieuses, la préméditation n'y existe pas, et elle transforme ses désirs en acte car elle est toute puissante. Elle est déraisonnable et extraordinairement crédule. Les témoignages des individus dans une foule sont souvent erronés, les sentiments très simples et exagérés. Elle est intolérante, ne supporte pas les contradicteurs, et vénère l'autorité. C'est ainsi que la foule se trouve capable de crimes horribles ou de grands héroïsmes. Chez les foules criminelles on s'aperçoit que les crimes s'accomplissent de manières naïves.