Au XXe : période des fascismes – ils avaient une passion pour la
grandeur. Pour Mussolini « fallait vivre dans une période de très grande
tension idéale ». On retrouve ça dans les manifestations de rue, la
politique vue comme une épopée, la vie vue comme théâtrale.
Ces exemples peuvent nous permettre de comprendre que l’autorité charismatique ne dure pas, contrairement aux autres
types d’autorité. Elle est liée à un
individu et ne se transmet pas – elle ne dure donc que ce que dure l’homme.
La perte de l’autorité charismatique peut être du également à
l’effondrement de son charisme. Il est fondé sur une forme d’artifice (en plus
de son caractère), notamment ses victoires. Souvent on lui obéit tant qu’il est
victorieux (ex : Alexandre le Grand) ou qu’il a le pouvoir (Charles De
Gaulle).
Néanmoins le charisme peut s’entretenir [Gracian (XVI-XVIIe)] ;
-
La
raison : le plus récent
L’autorité rationnelle se développe avec l’âge moderne, dans des sociétés
sécularisées (pas assises sur les religions) et dans les sociétés démocratiques
des temps modernes. Dans cette autorité, le chef est un homme ordinaire :
ce n’est ni un fils de prince (lignée), ni un homme charismatique.
On part du principe que nul individu n’est supérieur aux autres (malgré les
inégalités) : tous sont capables de mener leur destin. Ils ne sont pas
égaux en intelligence, en beauté, etc. mais ils sont tous capables de décider
de leurs propres destins. Ex : choisir son conjoint, son métier, éduquer
ses propres enfants…
Pb : pour diriger la société il faut un chef/des chefs puisque tout le
monde ne peut pas diriger à la fois.
è Contradiction entre la capacité de tous de diriger
et le fait qu’il faut un chef
è Réponse : chacun va diriger tour à tour ou
alors tout le monde vote pour celui qui va diriger.
Naturellement il y a eu des démocraties
dites totalitaires/jacobines/léninistes (Talmon) : les gouvernants
disent qu’en principe les citoyens sont capables mais en réalité ne le sont
pas, et le chef doit ainsi dire ce qui est bon pour eux ; on retire aux
gens leur capacité de se gouverner par eux même (ex : l’Etat éduque vos
enfants).
Donc on met à la tête du gouvernement un chef normal, menacé de renvoie
s’il se comporte mal, perte de protection à la fin de son mandat.
Autorité rationnelle, parce que comme le disait Claude Lefort, la place du
pouvoir est toujours vide dans une démocratie. Le siège est vide càd que celui
qui s’installe sur le siège du gouvernant ne restera pas ; le siège ne lui
appartient pas. Il est le locataire temporaire de ce siège = démocratie.
L’autorité rationnelle signifie que la reconnaissance de l’autorité est une
démarche de la raison : j’obéis parce qu’il a été élu. Le gouvernement
devient nécessaire en raison. Ce qui fait autorité ici, c’est la loi. C’était
ainsi définit par Platon à la fin de sa vie, qu’aucun tyran n’acceptait de
devenir sage – le grand homme supérieur n’existe pas ; finalement nous
n’avons qu’à donner l’autorité à la loi, càd quelque chose d’impersonnelle, de
rationnelle – l’Etat de droit : l’autorité rationnelle obéit à la loi,
garantit par le Conseil Constit.
L’autorité rationnelle ne fonctionne que si les citoyens sont éduqués à
minima. L’éducation, c’est la connaissance des mots qui remplace la violence,
il faut faire en sorte que les individus connaissent les mots càd connaitre les
relations entre les individus ; si on ne sait pas parler on tape.
Ccl : cette typologie de Weber est la meilleure pour l’instant.
Les déviances de l’autorité : davantage au XXe qu’avant, il y a une sorte de dégout de l’autorité qui
s’installe et on finit par le rejeter.
L’autorité consiste à obtenir l’obéissance sans employer la force ;
mais les humains, êtres imparfaits, un individu qui a du pouvoir peut mal
l’utiliser notamment pour la violence. Si violence elle perd son statut
d’autorité tout en continuant son chemin ; l’autorité peut également
perpétuée par des voies mensongères ; celui qui a l’autorité peut abuser
de son autorité càd profiter horriblement de la confiance que lui font les
gens.
Distinction bonne et mauvaise autorité ? La seule chose qui légitime
l’autorité c’est le consentement ; et donc il est difficile de les
distinguer (consent mais tromper). Le consentement ne suffit donc pas. La
finalité d’une bonne autorité : le bien de ceux qui obéissent. Donc
comment repérer le Bien ? Il peut avoir consentement, mais pas le Bien.
Ex : les sectes – consentement mais certitude que le malheur est
présenté comme le bonheur. L’histoire finit par trancher, après beaucoup de
dégâts, ceux qui obéissaient se rendre compte.
è Avant que l’histoire ne tranche, le consentement
s’exerce dans l’ignorance.
Donc comment l’autorité trompe ?
-
Elle peut se
tromper elle-même
-
Elle peut
abuser de la naïveté de ceux qui obéissent (les enfants principalement, ou les
personnes naïves ou détruites par le malheur)
-
Elle utilise
les ressorts de la psychologie
-
Manipulation
de façon à vicier les présupposés de l’obéissance par des raisonnements tordus
Exemples d’abus d’autorité :
·
Au nom de la
science (le plus grave) : propositions universelles et catégoriques. Il
n’y a pas de tolérance en science tant qu’il n’y a pas de remise en cause. La
réalité scientifique est la même pour tout le monde. L’autorité scientifique
est considérée comme absolue, à partir de là elle est utilisée par certains
pour obtenir des consentements dans d’autres domaines ; il va être
possible parfois de costumer des certitudes de foi en certitudes de science.
Expérience de Milgram : on a inventé une
expérience pour mesurer la mémoire ; les scientifiques voulaient faire une
expérience sur les dégâts d’une autorité abusive. Des étudiants recrutés dans
un hôpital, reçus en blouse blanche, et on les installe à un bureau avec un
autre étudiant en face. Lire une liste de mot, et celui en face va devoir la
restituer. En cas d’erreur on lui demande de lui envoyer une décharge
électrique. 20% des gens refusent dès le début, 80% continuent. En face :
ce n’est pas un étudiant, et commence à se plaindre de la douleur. Et celui qui
abat une manette est en train de faire le lien entre la mémoire et la douleur.
è Un individu x obéit à l’autorité
scientifique ; 80% des individus font tout pour croire que l’autorité
scientifique et l’autorité morale sont les mêmes.
è Le nazisme s’est appuyé sur des sciences dévoyées
(ne sont plus des sciences mais se présentées comme telles).
Expérience diffusée à la télévision.
·
Abus
d’autorité idéologique : asservie les individus de façon analogue à la
celle de la science. Idéologie* :
conception du monde achevée (s’occuper de toutes les dimensions de la
vie) - peuvent se fonder dans une religion (toute en ont la capacité),
dans une science (les soviets – DIAMAT : matérialisme dialectique :
tiré d’une science, qui fait semblant d’en être une).
Sacré ou objectif à les deux sont des conditions d’obéissance.
S’impose par des habitudes de penser, des préjugés
– cela devient une sorte de sacré au fur et à mesure. Ainsi des peuples
finissent pas croire que des choses sont vraies, juste parce qu’ils ont
l’habitude de le penser.
RQ : il vaut mieux croire la réalité plutôt
qu’une théorie qui dit le contraire ; mais beaucoup de disciples sont
incapables d’esprit de critique, et agissent comme des automates (voient les
crimes mais ne les admettent pas).
Autorité d’idéologie est dangereuse parce que durable (contraire du charisme). Les équipes
qui se succèdent réinvestissent l’idéologie.
·
Culte de la
personnalité : dénaturation du charisme. Faute faire par l’autorité
charismatique, la personne est divinisée, elle est rendue plus grande que
nature (plus qu’un humain) et traité comme telle. C’est un excès pervers de la
reconnaissance. Personnages qui se transforment en idoles de chair – c’est un
moyen commode pour manipuler la population. (Ex : Ceausescu avait des
sosies dans le pays pour démontrer son ubiquité).
Une population peu scolarisée croit.
A l’âge des masses, les idoles sont plus nombreuses.
Phénomène que l’on repère à une sorte d’emphase ridicule qui accompagne le
chef (ex : agenouillement devant les Eva Peron en Argentine –
divinisé : on ne s’agenouille que devant les Dieux).
Autorité tellement totale, que malgré la terreur,
le chef est vénéré. La plupart des gens pensent que si toute la terreur existe
c’est que le chef est n’est pas au courant, que ce sont ses mauvais sbires qui
répandent la terreur.
Servitude volontaire (existe toujours) : comment des peuples se
plient si facilement à l’autorité excessive ? Plaisir d’obéir à de
mauvaises autorités ?
1e explication :
Dans l’antiquité, les grecs qui vivaient en démocratie ne comprenaient pas
pourquoi là y avait des formes de pouvoir arbitraire, les gens obéissaient
quand même. Pour eux : les orientaux étaient contents d’obéir, et c’était
une question de gènes. Cette idée de « race obéissante » a traversé
les siècles - de Strabon (Antiquité) à Custine au XIXe : les russes
sont « ivres d’esclavage » - c’est leur nature.
2e explication :
par le climat. Quand on vit dans un climat chaud on aime la servitude, parce
que dans les pays chauds on n’a pas envie de bouger, et donc beaucoup plus
dociles. Montesquieu : le chaud rend paresseux et donc docile, alors que
le froid aiguise le courage et l’activité à les pays du nord : sont les premiers à être des pays libres (c’est
vrai).
3e explication :
La Boétie, Contr’un : comment se
fait-il que toute la société obéisse à un seul individu – il faudrait un esprit
de soumission alors que la liberté est naturelle à l’homme. La liberté est
louée, pas la servitude : on réclame la liberté, personne ne réclame la
servitude. Ce livre a été repris au XXe avec des textes de Simone Weil
(philosophe), réunis sous le titre « Oppression
et Liberté ». Ils pensent qu’un peuple peut s’endormir dans
l’oppression : trouver une place confortable dans l’oppression. Il est
possible que l’oppression apporte quelques avantages – ex : après la
chute du mur, notamment en Bulgarie : on ne peut pas revenir au communisme
pour des raisons idéologiques alors même que nous étions plus heureux – il n’y
avait pas de chômage, paresse agréable, pas peur de l’avenir : le peu
qu’ils avaient était assuré pour toujours.
4e explication :
Steiner et Thomas Mann – ils disent
qu’il y a une sorte de dégénérescence de la culture de la liberté : on
finit par ne plus savoir ce qu’est la liberté à force de la voir sans la
regarder. Un bienfait que l’on a tout le temps et que l’on finit par ne plus
connaitre la signification. On ne la goute plus, on l’oublie, et on ne s’en
sert plus (on ne connait plus ses avantages).
5e explication :
concept par Gustave Lebon, Psychologie des foules - la
propagande politique : autorité artificielle qui peut s’organiser d’autant
plus facile que l’on constitue le peuple en foule. Un peuple et une foule ce
n’est pas pareil. Un peuple : ensemble de gens réunis dans des groupes
étant en lien les uns avec les autres –société est tissée de relations de
connaissances et de réciprocité.
Si on constitue le peuple en foule : il est plus facile de les faire
obéir. Diviser pour régner : la foule sépare les gens de leur groupe
d’appartenance. Dans une foule, l’individu va perdre ses caractères habituels,
la vie consciente à tendance à s’effacer. L’individu plongé dans la foule se
sent puissant et irresponsable ;
puissant parce qu’il fait partie d’une foule (chacun a peu de force mais pas la
foule) et irresponsable (parce que la foule est un tout, on ne
l’individualise pas). Par ailleurs
l’individu dans la foule est influençable parce que la raison s’écarte, il est
la proie de ses sentiments et de ses émotions (cris, slogan, gestes), par
conséquent le meneur de foule saisit les gens pour les faire commettre des
actes qui en temps ordinaires ils n’auraient pas commis. Le meneur a compris
comment réagit la foule, il la sent. Lebon explique qu’avec l’âge des foules, cette
manière de mener les foules est devenue presque technique : pour emmener
une foule il faut affirmer et répéter à commettre un acte précis : piller, tuer, se faire tuer. Idées simples
transformées en slogans et affirmations.
Dans Mein Kampf, dernier chapitre
sur la propagande : seule technique qu’il connaissait bien. Il brosse un
portrait de l’homme qui se trouve dans la foule : paresseux, affectif,
passionné, bourré de préjugé (la moindre rumeur l’emporte). Hitler met en place
une théorie de la propagande expliquant à ceux qui vont faire de la politique
avec lui, et ceux qui vont parler dans les salles : comment il faut faire
pour que les gens écoutent et soient d’accord. Ne jamais parler le matin (en
pleine forme) parce que c’est là où l’on a le plus de libre arbitre. Il ne
s’agit pas de convaincre mais de s’introduire dans l’esprit – se produire dans
des foules les plus importantes possibles. Choisir les moments et l’auditoire :
on n’utilise pas les mêmes expressions selon les auditoires. C’est ainsi que
l’autorité devient une puissance dangereuse.
Comment éviter ça ? Développer l’esprit critique ; il ne faut pas
se dire qu’il faut chercher le bon gouvernant, la seule solution est de
développer critique chez les peuples via l’éducation, càd la famille et l’école
(les deux réunis) ; il faut avoir quelque chose à critique : la
culture. Se réfléchir et réfléchir dans ses pensées ! L’esprit critique
n’existe que s’il n’y a pas qu’un seul discours imposé – pour être libre de
penser.
Il y a des conditions chez le peuple lui-même pour éviter ces excès :
-
Il faut un
niveau de confort matériel : un peuple affamé est une proie facile
-
Niveau
intellectuel : apprentissage de l’esprit critique qui passe par la
connaissance des mots
-
Niveau de
conscience morale : s’apprend dans la famille et à l’école. Il faut des
critères éthiques pour juger une autorité.
6e explication :
Il existe aussi une autorité occulte :
celle de la contrainte sociale ; quelque chose qui ne se dit pas mais qui
existe partout (à différent degrés). Les idées passent, se diffusent d’un
groupe à l’autre et engendrent des comportements. Idées véhiculées par tout le
monde. Dans les sociétés de masse on a tendance à assimiler la répétition à la
vérité ; on a tendance à identifier un personnage connu à un personnage
reconnu. Les époques médiatiques de masse sont abandonnés aux opinions les plus
répétées, et s’y soumet de manière mystérieuse. Il y a une opinion dominante
mais il faut en avoir conscience pour développer son esprit critique. La mode
des idées est pesante.
Question de la psychologie de
l’autorité : cette
relation entre l’autorité et celui qui obéit est autoritaire, hiérarchique et
donc exclue l’amitié (relation d’égalité). L’homme d’autorité n’est pas un
autoritaire sauf si on fait dériver le langage ; l’autoritaire ne parvient
pas à avoir de l’autorité alors qu’il l’a veut, c’est celui qui singe
l’autorité, et a donc un comportement parodique.
Mounier écrivait « l’autoritarisme est un gout de
faible… » : intimidation frauduleuse.
Psychologie qui a l’autorité : le véritable chef n’est pas quelqu’un
de narcissique ou de mesquin, il est identifié à une œuvre collective. Entre
l’autoritaire et l’homme d’autorité : l’autoritaire est pointilleux,
méticuleux, alors que l’homme d’autorité ne s’enferme pas dans le détail, et
cherche à préserver la distance entre lui et ceux qui obéissent (il est seul –
et donc pas heureux).
Le chef est malheureux : la gloire, fruit de l’autorité, est le deuil
éclatant du bonheur. L’homme d’autorité doit préserver la distance :
« nul n’est grand homme pour son valet de chambre » ; le chef
s’entoure de mystère sinon il égare son prestige. Gracian : il faut se
rendre impénétrable sur l’étendue de ses capacités. Il étonne et n’est pas
étonné. Ne confie pas sa vie privée pour éviter la fragilité. Ne pleure pas sur
ses malheurs, ne se plaint pas. Le chef n’est pas plus grand que les autres,
néanmoins il doit faire comme-ci il était plus grand. Il se nourrit de
l’admiration qu’on lui porte ; il va donc s’entourer de mystère parce
qu’il sait que les mots trahissent.
Le processus de la perte de
l’autorité : dans la dialectique du maitre et de l’esclave
analysé par deux grands auteurs : Platon et Hegel. C’est la démonstration
du passage par lequel le maitre devient esclave, et l’esclave devient maitre.
Le maitre a cessé d’avoir toutes les qualités ci-dessus (distance, énergie,
mystère) ; Platon : le maitre et l’esclave en temps de guerre, après
la bataille, le maitre est gros, souffle, sue et se plaint ; tandis que
l’esclave est fort, se tait, et ne se plaint pas.
I.
L’opinion
publique
Stoetzel : l'opinion publique* est
un sentiment dominant au sein d'une communauté sociale, qui est accompagnée
plus ou moins clairement de l'impression que ce sentiment est commun.
Il y a donc l'idée de convergence
des appréciations, l'impression que nous sommes très largement d'accord sur quelque chose que nous
appelons une idée, une conviction,
ou autrement dit un sentiment.
Il faut ajouter l'idée que l'opinion publique exerce une pression, il est difficile d'avoir une opinion inverse, ainsi l'opinion générale impose une puissance.
Il est difficile d'être seul contre tous d'où cette puissance, cela tient au
fait que les individus aiment appartenir à un groupe et détestent en sortir.
En outre, l'opinion publique n'est pas
quelque chose de scientifique,
dans la mesure où une affirmation scientifique n'est pas une opinion. En cela,
elle se distingue de l'information qui révèle un fait.
è On parle d'opinion
publique non seulement par ce qu'elle est partagée par un nombre important, mais aussi par ce qu'elle s'impose, ce qui permet ainsi
de comprendre un certain nombre de choses qui se passe dans la société.
Il ne faut pas confondre opinion et consensus.
Le consensus* est
un accord silencieux et spontané,
concernant un certain nombre de règles
générale de la société, sur lesquelles le corps social est silencieusement,
spontanément d'accord. Une société ne peut pas vivre sans un minimum de
consensus, en cela il en devient essentiel.
Bien que le consensus ne soit jamais totalement unanime, mais il s'agit
d'une adhésion qui est largement étendu
sur la société telle qu'elle est. Toutefois cela ne veut pas dire que le
consensus ne peut pas changer, qu'il ne peut être remis en cause et être au
cœur des débats pour amener de nouvelles bases.
L'opinion publique* à l'inverse du consensus, n'est pas silencieuse, elle est quelque chose
dont on parle et qui traverse des courants de pensées, elle s'exprime à travers des groupes qui
constituent des forces qui ne sont d'ailleurs pas forcément majoritaires.
Ce qu'on appelle aujourd'hui le consensus pourrait renvoyer à ce que les
anciens qualifiaient d'esprit public (17é s.) il est devenu opinion
publique au XIXe. C’est le fruit d'une
transformation politique à travers le passage de l'aristocratie à la démocratie.
Peu à peu grâce à un certains nombres de réformes le pouvoir de l'élite va devenir le pouvoir de la masse
(2 siècles jusqu'à ce que les femmes soient intégrées après la 2GM).
Cela sera aussi permis par le développement
des moyens de communication (pendant 2 siècles : début XIXe/XXe),
apparition de la publicité à la
charnière de ces deux siècles, le développement de la presse (19é s.), développement des journaux bons marchés, des
moyens de communication qui ne vont pas cesser de se développer jusqu'à la
révolution informatique. C'est ce développement exponentiel qui permet l’apparition des courants d'opinions.
Il apparaît des sentiments de
masses qui sont plus ou moins dictés, modelés par l'information de
masse. Autrement dit, ce que l'on savait de l'esprit public va devenir de plus
en plus important, en raison du régime démocratique, et de la technique, tout
le monde pouvant accéder en permanence à l'opinion générale.
L'esprit
public avait déjà été défini dans
L'Esprit des Lois de Montesquieu au XVIIIe ; en effet
il provient des groupes religieux, politiques, culturels. Par conséquent, l'esprit public est l'esprit français par
ce que nous sommes en France ou encore l'accord tacite de tous les FR sur
l'ensemble des mœurs de la société, une sorte de consensus national. Au XVIIIe on voit apparaître cette idée de
consensus et d'opinion publique, opinion
publique* capable de détruire le consensus.
On va donc voir apparaître des courants d'opinions qui forment des partis, et
des luttes pour ou contre le consensus (révolution FR).
C'est dans cet ordre d'idée que l'on peut comprendre Rousseau et la distinction
entre la volonté générale et la volonté de tous.
·
La volonté générale* est ce qui constitue la société en vue de l'intérêt commun.
·
En revanche,
la volonté de tous* est la volonté (particulière) des groupes additionnés, soit la volonté
de tel parti puis de tel autre par exemple etc. ce sont des volontés
particulières (intérêts particuliers) additionnées.
Distinction entre le collectif et la communauté.
·
Une communauté* va au-dessus
des particularités. L'esprit public renvoie au sentiment de la communauté,
l'esprit qui parvient à surmonter les particularités.
è L'avènement
de la démocratie et des moyens de communication ont marqué l'avènement des
masses, et de l'opinion publique qui l'accompagne.
Cela a été décrit par Tocqueville
dans De la démocratie en Amérique. Il explique que dans la démocratie
nous sommes tous égaux et au nom de
cette égalité, nous écoutons le jugement du public, bien plus que celui du
savant (l'être de raison).
è La foi dans l'opinion commune deviendra religion.
L'opinion publique ne gouverne pas seulement en démocratie, elle a
un poids énorme dans les régimes
autocratiques (totalitarismes, dictatures, etc.). Dans ces régimes, le
pouvoir s'appuie aussi sur l'opinion, dans ces cas-là le chef fabrique l'opinion, c'est là l'idéologie des gouvernants qui fabrique la volonté des peuples.
Même dans les régimes autocratiques, le pouvoir gouverne seul, mais il doit
fabriquer une opinion, il ne peut la laisser se faire toute seule ; une
opinion divergente ne peut s'exprimer. Développement de Ministères de
l'information qui contrôle l'information (ex : suppression des imprimeries
privées), ce qui conduit aux délits
d'opinions, lorsqu'on commence à dire qu'il y a trouble à l'opinion public
en cas d'expression d'une position divergente.
On s'aperçoit que les dictateurs
travaillent beaucoup avec le peuple,
cela s'explique par le fait que ces-derniers détestent les élites et l'aristocratie. Les dictateurs se font
élire par les peuples, par ce qu'on sait que ces derniers vont abolir les
aristocraties, les sociétés dictatoriales sont centralisées à l'inverse des
sociétés types féodales. D'une manière générale, les tyrans sont mis en place par des peuples, consentants (idées simples)
et subjugués (charisme).
Les dictateurs arrivent au pouvoir par des referendums plébiscites,
l'opinion est un peu forcée, parfois plus qu'un peu. L'autocrate va gouverner
en maintenant à sa botte l'opinion publique par des discours, des
rassemblements, en essayant de faire passer le courant entre lui et le peuple
de manière directe sans passer par l'aristocratie, il usera de démagogie, à
travers un programme ambitieux du point de vue social.
Lorsque l'opinion est réduite du fait de la délation, l'opinion va réapparaitre
par des canaux officieux (atteste le
fait que personne ne peut se passer de l'opinion) ; cela passe par le
bouche à oreille, les réunions secrètes (universités volantes dans les caves
par exemple), la prise de risque pour la liberté d'opinion (exemple de la Rose blanche).
Il y a une volonté naturelle à l'humain
d'avoir une opinion à soi lorsque le
pouvoir vous en impose une. Il y a des difficultés, il faut du courage et
néanmoins cela existe toujours à chaque époque, tout est prétexte pour que cela
réapparaisse, aussi, est-il difficile pour un pouvoir de ne gouverner que sur
la terreur. C'est ainsi que le philosophe Alain
écrivait : « Les problèmes politiques sont impénétrables, la force
gouverne, mais l'opinion domine, nul
pouvoir n'a osé braver l'opinion ».
L'opinion est une expression de la
maitrise c’est en cela qu'elle a
du pouvoir, plus sournois et plus
ambiguë que le pouvoir lui-même, s'exerçant par la pensée, sans persuasion
de manière générale, une sorte de pouvoir
par la répétition. Il y a une maitrise de l'opinion dominante, lorsqu'elle
se répète elle finit par assujettir. Les individus sont très sensibles aux
arguments qui courent, avec le sentiment
que la répétition rend les arguments vrais et indéniables.
è C'est ainsi que les pouvoirs forts/autocratiques
se sont emparés de cela à leur propre profit. Si quelqu'un veut prendre le
pouvoir il commence par acheter la presse. « Acheter la presse et vous
serez maître du pays » Franc-Maçon.
Aujourd'hui, la technique déborde la
surveillance, avec un flow d'analyses qui empêchent que nous interdisions quoique ce soit et qui empêchent la
dictature des sociétés d'opinions. On s'aperçoit qu'il est difficile de limiter la connaissance
des gens. Il y a un certains nombres de drames qui ont été cachés pendant
longtemps, on s'aperçoit que la force de
la transparence est de plus en plus grande avec les moyens techniques.
Par ailleurs, le développement de la
presse et de l'informatique, fait en sorte que le nombre d'opinions
développées peut finir par développer une
mode, où les journalistes répètent les uns sur les autres : « nous
n'avons pas une censure de la presse, mais une censure par la presse » nous ne pouvons pas lire quelque
chose qui aille contre l'opinion publique.
L'opinion publique se fonde sur le sentiment et l'émotion, tout le problème de la démocratie qui se fonde
sur l'opinion publique, alors que les décisions politiques réclament des
décisions à long terme, c'est à dire qu'un dirigeant
politique ne peut prendre ses décisions en ne suivant que l'opinion,
difficile car tous gouvernements veut
être aimé de l'opinion. C'est pourquoi la tentation est forte d'être dans
la démagogie, car aucun chef ne souhaite être impopulaire. Par ailleurs,
l'opinion publique se fonde sur
l'émotion, car d'une manière générale elle se retrouve dans des foules. Or une foule est en soi dangereuse.
Les premières foules* dont nous avons connaissance dans les cultures
européennes, sont la foule d'Homer dans l’Iliade, plusieurs milliers de
guerriers réunis, avec le Roi des rois Agamemnon qui est en train de plaider la
guerre de Troie. Il donne à lire la description de la foule :
·
elle change d'avis facilement, sans cesse, mais
elle est toujours sincère, une sincérité successive, d'où la dangerosité
·
L'irresponsabilité caractérise particulièrement
les foules, qui ne disposent pas d'autocritique
·
Une espèce d'incapacité à raisonner,
·
Elle n'a pas de mémoire, elle peut encenser une
figurer pour aussitôt l’envoyer à la mort
L'opinion que l'on trouve dans la
foule a besoin d'être instruite,
en cela plus elle sera instruite plus elle pourra faire usage de la raison. Cela est fragile, car on va s'apercevoir lorsque des gens instruits sont ensembles, ils
perdent leur instruction.
Marc Orel pointe un paradoxe, l'éducation de
l'opinion publique est un endoctrinement, on
ne peut instruire une foule, on n'instruit que des individus. Si on veut
avoir un raisonnement et apporter une argumentation
à quelqu’un on peut le faire à un petit
groupe avec qui il est facile de discuter et d'argumenter. Face à une foule les arguments deviennent
assertions, ils en deviennent pauvres. Il y a une sorte de paradoxe dans le
rapport à l'opinion publique qu'il faut respecter si on est démocrate, mais la
respecter est mettre en avant l'émotion qui est quelque chose de primaire, et
qui requiert d'être mise en cause. Le seul moyen que l'on est trouvé pour
contrecarré cela est faire en sorte qu'un peuple
soit pris en petits groupes et non en foule pour préserver leur raison.
è La réponse à ce paradoxe de l'opinion est donc la décentralisation.
II.
La
propagande politique
La propagande politique se développe à
l'âge des masses. Ce phénomène a été relativement bien décrit par Ontefa Y Fasset.
Au XXe, la propagande politique va trouver des théories et des applications vertigineuses,
elle en deviendra une véritable science,
ce qui va naturellement permettre à des
régimes totalitaires et dictatoriaux de s'installer. Cette propagande n'est
rendue possible que parce-que les
individus sont regroupés en foule, les moyens de transports d'informations
étant désormais rendus possibles.
En outre, les individus qui
apparaissent dans ces foules, sont d'avantages solitaires et moins liées à leur
communauté qu'autrefois.
-
Lorsque des
individus sont physiquement ensemble,
c’est une foule,
-
lorsqu'ils
sont devant une TV par exemple, ils sont éparpillés
et forment donc une masse
L'étude de ces comportements
devient une branche de la psychologie
sociale, dont on tire des lois,
comment influencer cette masse de
manière à lui faire faire ce qu'on veut, avec un certain nombre de recettes
pour mieux tromper le peuple. C'est ainsi qu'apparaissent en même temps un
certains nombres d'affirmations morales
sur la tenue de ces études. On va alors se
demander :
-
si ces
régimes qui emploient ces méthodes sont valables,
-
si traiter
l'homme dans une foule ne revient pas à l'amenuiser,
-
comment peut-on
juger le monde moderne qui utilise la psychologie des foules pour gouverner,
Il se produira au cours du XXe un changement
d'opinions général sur ce qu'on appelle le peuple
qui va devenir une masse.
Selon Michelet,
·
un peuple* est un ensemble
de gens qui raisonnent, discutent entre eux, ont des opinions et non des vagues émotions qui passent. Ce peuple dont
qu'il évoque et pour lequel il a une forte admiration est le peuple de la démocratie qui vote et qui est un groupe de citoyens.
·
En revanche,
ce qu'on appelle la foule* et la masse*, sont
les mêmes individus qui au fond ne fonctionnent pas de la même façon, ils ne sont plus inscrits dans leur groupe
et ils vont réfléchir à coup d'émotions,
au moment. Ainsi d'une certaine manière ils vont perdre leur raison.
Toute une théorie va alors voir le jour, où le comportement des humains varie
selon qu'on se trouve dans un petit groupe ou dans un groupe très vaste.
Elle dit que certaines
capacités humaines ne peuvent s'exercer qu'individuellement, car elles ne
peuvent s'exercer que dans un certain recueillement,
il faut entrer en soi même pour
être capable d'exercer ces capacités que nous avons en nous.
è Par conséquent, un homme seul va être capable de
juguler et refreiner des passions, tandis que si on lui insuffle la colère dans la foule, il va être pris dans une sorte de tourbillon où seuls les phénomènes de la surface* ressortent (la passion, l'excitation, la colère) à la différence des
phénomènes de profondeurs* (réflexion,
critiques, raison).
En cas de prise de décision, une dialectique
se joue entre la surface et la profondeur, il arrive bien souvent que
lorsque nous sommes au milieu d'une foule nous prenions une décision, et une
fois le recul pris on s'en détourne. Au fond nous sommes capables d'être nous-même
lorsque nous prenons un temps de silence. Il ne faut jamais prendre de décisions importantes au sein d'un groupe.
On s'aperçoit ainsi de l'usage dont
usent certains pouvoirs pour maintenir les individus à l'état de masse,
pour nous empêcher de rentrer en nous-même et de nous poser les vraies
questions. Celui qui sort de la manifestation de masse, retrouve la répétition
dans la rue avec la transmission du discours du chef, la photo du chef etc.
Ainsi pour maintenir les hommes en « masse » il y a des « trucs » (moyens techniques)
pour agglutiner ces individus de sorte qu'ils soient toujours ensembles.
Les modernes se sont rendus compte que l'on pouvait facilement tromper les
foules. Le premier livre sur la question G.
LEBON. Il expliquait que la foule
avait une âme collective, l'âme de la foule, essayant de comprendre comment l'individu changeait
lorsqu'il était dans la foule. Il soulève trois points importants :
·
Dans la foule l'individu sent qu'il est puissant, par conséquent celui qui ressent qu'il est
puissant va cesser de refreiner ses
instincts.
·
Dans la
foule, l'individu est irresponsable,
il n'y a pas de responsabilité collective (elle n'existe pas). Toutefois il
existe que nous puissions nous sentir
obliger d'assumer les fautes des gens qui appartiennent à un groupe auquel nous
sommes affiliés.
·
Dans la
foule, il se produit toujours un phénomène
de contagion. Il est paralysé dans la mesure où ses capacités de raisonnement ne sont plus les mêmes que lorsqu'il
était seul, l'inconscient prend le
dessus, il est comme hypnotisé. Une foule peut être littéralement hypnotisée et paralysée par celui qui
lui parle, s'en suivra un effet de contagion, où les foules deviendront
serviles.
Les individus se transforment lorsqu'ils sont en foules prenant des
décisions qu'ils n'auraient jamais prises si ils n'avaient été que quelques
un(e)s (c'est ainsi que les citoyens d'Athènes avaient condamnés les décideurs
d'Arginuses). On peut donc dire que la
foule est déraisonnable, elle répond à des impulsions impérieuses, la
préméditation n'y existe pas, et elle transforme ses désirs en acte car elle
est toute puissante. Elle est déraisonnable et extraordinairement crédule. Les témoignages des individus dans une
foule sont souvent erronés, les sentiments
très simples et exagérés. Elle est intolérante,
ne supporte pas les contradicteurs, et vénère
l'autorité. C'est ainsi que la foule se trouve capable de crimes horribles ou de grands héroïsmes. Chez les foules
criminelles on s'aperçoit que les crimes
s'accomplissent de manières naïves.
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