Lecture possible : Reneo Lukic, La désintégration de la Yougoslavie
et l'émergence de 7 Etats successeurs
La
crise yougoslave
1.
Le
phénomène Milosevic
Trajectoire du fou (cf. Laurence Hartmann)
Sa nomination en 86-87 va conduire à un climat dégradé du conflit
yougoslave, accélération de l'histoire violente.
Né en août 1941, en Yougoslavie, dans un contexte de violence, père
théologien orthodoxe monténégrin, mère de gauche engagement communiste pendant
la guerre, les deux se sont suicidés ds les 60s. Milosevic a un caractère
monténégrin-serbe. Il effectue un cursus d'étudiant de droit, rencontre avec Stambolic dont le père est
le chef du PC Serbe (un des leaders de la Yougoslavie Titiste), il devient très vite le numéro 2 du PC en Serbie
début 80s. Fils Stambolic deviendra lui
n°1, Milosevic le fera assassiner suite à une désaccord/crise
idéologique.
Stambolic était titiste càd partisan d’une auto-gestion, du non-alignement,
du fédéralisme. Mais en 1986, 6 ans après la mort de Tito, aux vues de
l'évolution économique et du panorama mondial, se pose la question du devenir,
et du « quoi faire ». Stambolic fils n'entendait pas changer le
système, alors que se présentait une occasion de tout changer ce qu’a fait Milosevic
en prenant le pouvoir.
2.
Remise
en cause du Titisme
En Serbie, une partie des élites a voulu critiquer le titisme ds ses bases
fondamentales, c'est ce qu'on appelle le Manifeste
de l'Académie Serbe des Sciences et des Arts
publié le 24 octobre 1986, appelé
aussi Manifeste de la SANU.
RQ : ce genre d'académie existe dans la plupart des pays slaves.Parmi
ces élites on retrouve des écrivains telque Koca Papovic (président de la
Serbie entre 93-97).
Ce groupe là veut une re-serbisation
du système yougoslave ou au moins de la Serbie. Selon eux, Tito et le
Titisme, entre 66-86, aurait été défavorable au peuple serbe. Cet anti-serbisme
du système serait la cause de la crise.
·
le peuple
serbe aurait été dispersé entre plusieurs entités politiques – ils n'ont pas
totalement tort d'un point de vue administratif – il y a des serbes dans la
Serbie proprement dite mais pas seuleument.
·
Ils
considèrent que beaucoup trop d'autonomie a été accordée aux républiques
autonomes de Serbie (Kosovo), de ce fait ils considèrent qu’ils ne sont plus
chez eux. Entre mars 1965 et 1986 : état de siège au Kosovo par la police
ayant des pouvoirs spéciaux.
Si on se place du point de vue Serbe, depuis 68
large autonomie accordée – le cas du Kosovo est le plus critiqué, car la
majorité locale n'est pas serbe, mais plutôt albanaise. Les serbes du Kosovo
sous entendus alors qu'ils sont dans la partie la plus mythique, sont gouvernés
par une majorité d'albanophone et d'albanais du Kosovo. Ces derniers allant
même jusqu'à considérer que ces serbes sont victimes de persécutions, viols, il
faut donc reprendre les choses en main.
On compte en outre une majorité de serbes en Bosnie-Herzégovine.
Le cas des serbes de Croatie (12,5% de la population) est plus
problématique. Selon les élites de la SANU ils sont persécutés et
menacés et ce en raison de l'autonomie croissante et importante de cette
république, notamment depuis les réformes de 68 et de 74. La république de
Croatie est encore plus autonome que le Kosovo. Cette grande autonomie est
selon la SANU un gage de menaces pour les serbes qui seraient dès lors sous la
houlette de peuples anti-serbes.
Plus encore, d'après eux, les musulmans, les croates et les albanais du
Kosovo, seraient autorisés par la Constitution Fédérale à massacrer les serbes à conclusion du SANU : le titisme par son évolution
progressive fut anti-serbiste.
Cette publication en pleine période de crise du communisme Titiste et économique,
provoquent des conséquences inattendues. Milosevic va changer d'avis et s’en
servir bien qu'initialement il n'y était pas favorable.
Le 27 avril 1987, Milosevic fait un
voyage au Kosovo. Contexte local : les communistes serbes ont organisé une
mise en scène dans laquelle ils s'en prennent à Milosevic, l'accusant de ne pas
protéger les communistes des musulmans. Milosevic déclare : « Moi,
Milosevic, je vous promets que vous ne subirez plus les menaces que vous
subissez. Ce peuple Serbe ne doit plus jamais être battu ».
Il y avait une perception de menaces réelles. Dès lors, sa trajectoire politique en a été
modifiée, considérant qu'il fallait mettre fin à l'autonomie du Kosovo, et
empêcher les Serbes d'être en proie aux leaders locaux. En se plaçant dans
cette voix, cela change la structure
totale de la Yougoslavie, car cela revient à demander au pouvoir fédéral
d'avoir un système plus centralisé, de réévaluer le rôle du peuple serbe. Cela
va dans le sens inverse du titisme historique, un changement total de la
programmation yougoslave. Le programme en soi n'est pas forcément source de
violence, car une reconfiguration politique peut être négociée pacifiquement.
Mais l’idée de Milosevic va à l'encontre du titisme, et risquerait de mettre en
cause les équilibres en place ; d’autant plus que les républiques tiennent
à leur autonomie, et ne veulent pas d’un pouvoir centralisé. En outre, dans ce
contexte de crise économique la réflexion n’allait pas dans un sens favorable
aux républiques mais plutôt dans le sens inverse c’est-à-dire moins de
centralisation, moins de communisme, plus de libéralisation. Certaines
républiques et d'abord la Slovénie (la plus au Nord), ne peuvent se rallier à
Milosevic, ce qui laissait présager un divorce total voire violent, ce qui
s'est avéré.
Milosevic a donc cherché à modifier
la constitution serbe, ce qui n'était pas sans conséquence sur les autres
constitutions dans la mesure où celles-ci étaient toutes liées entre elles. Pour
ce faire, il a cherché à perturber les autres républiques pour récupérer
d'avantage de pouvoir et de marges de manœuvres (cf. // Mao Zhetong). Les
années 87/88/89, seront des années de meetings provoqués par Milosevic qui vont
bouleverser la Yougoslavie qui ne s'en remettra pas.
Fin septembre 87, Milosevic prend le pouvoir dans
la ligue communiste serbe. Volonté de redonner au peuple serbe le contrôle de
la Serbie en premier lieu (donc fin de l'essentiel des autonomies du Kosovo et
de la Voïvodine), puis mouvement du même type au Monténégro, cela suppose que
la Yougoslavie doit être réorganisée au profit d'un Etat fédéral renforcé, une
fois advenu le regain politique des serbes.
Le 28 juin 1989
Milosevic organisera une manifestation monstre sur les lieux de la Bataille du
Kosovo, autrement dit Kosovo Polje, ceci pour célébrer le 600e
anniversaire de la bataille du 28 juin 1389, où s'est vu la défaite serbe. Les
défaites du passé doivent être célébrées pour montrer l'aspect vaillant du
peuple qui a su en renaitre. Milosevic : “Dans le passé le peuple serbe
a mené de grands combats, dans l'avenir il en mènera de nouveaux ». Ce
genre de déclaration a laissé entendre aux autres peuples un signal annonçantt
l'arrivée de nouvelles guerres.
28/29 mars 1989 : Milosevic supprime l'autonomie des
républiques de Serbie dont le Kosovo. La fin
de l'autonomie du Kosovo constitue la vraie entrée dans la crise, la
population albanaise n'acceptant pas ceci, se retrouve à tous les niveaux, et
les instituteurs, les policiers les
fonctionnaires hostiles à ces changements sont licenciés.
Se développe alors une résistance
passive, avec une société souterraine qui s'instaure, et menée par Ibrahim Rugova, élu clandestinement en
juillet 1990 président d'une république du Kosovo virtuelle et auto-proclamée
(effectif après 2000).
Ce mouvement ne deviendra violent qu'à partir de 1996, environ 2 millions
d'individus rentrent donc en dissidence avec le pouvoir. Cela ne devient pas violent
tout de suite, bien que surgissent de temps à autres des émeutes où meurent des
gens par dizaines. On revient à une sorte
d'état de siège où la police est au carrefour et surveille tout le monde,
avec une population hostile au régime.
Cette remise en place brutale, met une tension dans les autres parties de
la Yougoslavie, et la Slovénie entame son divorce avec la Yougoslavie
s'indignant de son évolution. Parallèlement, chute du système communiste en
juin-novembre 89 (Milosevic ne avait pas prévu), avec une crise généralsiée de
la région, et non pas localisée.
En novembre-décembre 89, au lendemain de la chute du mur, il y a un renversement du pouvoir yougoslave en
Croatie, ce qui est signe de crise,
car le PC croate telqu’il avait été remis au pas était l’effet d’un titisme
autoritaire ; le curseur repart donc dans le sens des communistes de 71
càd libéral.
En décembre 89, le Parlement Slovène proclame la supériorité des lois slovènes sur les lois yougoslaves, un procédé
qui va à l'encontre du principe fédéral.
Janvier 90, Congrès final où les PC yougoslaves se réunissent pour décider
des orientations à prendre étant donné la tournure des événements, tout est
donc à refaire, dans un contexte où tous les PC de la région tombent, et où un
déclin progressif de l'URSS. Lors de ce congrès on assiste à une rupture entre
les différents PC yougoslaves notmament en ce qui concerne les envies de
Milosevic pour un renforcement du pouvoir central et du système en faveur de la Serbie.
En Europe le communisme Yougoslave est le dernier à tirer le rideau ;
le système post-titiste se trouve au mileu d'un sorte de « no man's land »
communiste.
è Libanisation de la Yougoslavie : Explosion
de la Yougoslavie
Dans le contexte de la chute du communisme alors que la Yougoslavie est
fragile, on est face à une volonté de remettre tout le système à plat mais il
existe une perspective de violence à travers les discours de Milosevic.
C’est la volonté de remettre le Kosovo au pas qui a déclenché tout le
reste, les autres républiques sont chacune parties dans leur coin, chacune
voulant organiser des élections libres, en ordre dispersé république par
république, en avril 90 en Slovénie, en avril/mai 90 en Croatie, en novembre 90
en Bosnie, fin décembre 90 en Serbie.
3.
La
marche à la Guerre
En Croatie : parti
nouveau, en mai 90, parti nationaliste de centre droit, Franjo Tuctman, élu président par un système parlementaire puis
suffrage universel pour un autre mandat. Né en 1922, expérience politique
différente de Milosevic, il s'est battu en 41 contre les Allemands et les Ustachis.
Il est devenu historien par la suite, prisonnier du régime, puis président
croate, jusqu'en 99 date à laquelle il meurt (77 ans).
Son idée maitresse est de reconfigurer la vie politique en faveur de la
Croatie, en essayant de lui faire obtenir une partie de la Bosnie, au moins en
terme d’influence.
En Bosnie (carrefour de la
crise) les élections législatives de novembre 90 donnent l'avantage à une
coalition qui représente 3 peuples (3 partis) : le SDA (musulmans
nationalistes) avec Alija Izetbegovic, SDS de Radevan Karadzic (parti serbe
démocrate), HDZ (parti croate) – différents leaders dont Fikret Aldic.
Milosevic se fait quant à lui réélire.
La Slovénie est un mouvement d’indépendantisme modéré.
La Macédoine s'est échappée calmement de la Yougoslavie.
On est dans une structure
conflictuelle, la Croatie a été le déclencheur en raison de campagnes
nationalistes relativement hostiles aux serbes. Certaines communes croates font
sécessions avec le gouvernement fédéral. Structure de décomposition et de
violence car les serbes locaux ne veulent pas de gouvernements nationalistes
bosniaques ou croates, ils veulent faire sécession et ne pas suivre le
gouvernement local.
La
succession des guerres (1991-2001)
En Slovénie en juin-juillet 91 – une médiation
européenne permettra la résolution du conflit, provoquant une sorte de
conférence de paix à Brioni, on réussit à proclamer une sorte d'armistice le 8
juillet 91, ce qui aboutit à un accord provisoire.
Pendant 3 mois les indépendances sont gelées, période
durant laquelle on négociera ; la Yougoslavie retrouve une stabilité
provisoire, dirigée provisoirement par le président Stipe Mesic, la fonction lui avait été refusé par le
gouvernement serbe.
L'indépendance proclamée par certaines républiques,
vieille de 3 mois, est maintenue dans la mesure où une entente définitive n'a
pu être trouvée. Il y avait très peu de Serbes en Slovénie, il s'agit pour eux
d'un ailleurs, d'où le faible acharnement.
Croatie : le moteur de la crise est lié aux
évènements dans les autres républiques notamment en Croatie où il y a des
serbes qui ont le droit de se regrouper dans une même Serbie, perspective d'un
gouvernement autonome menace le gouvernement croate.
D'où la guerre de Croatie juin 91 – juillet 92, premier véritable conflit. Serbes de
Croatie n'ont pas envahi l'ensemble de la Croatie. Il y a eu des combats
pendant 6 mois, l'armée fédérale Yougoslave a essayé d'aider les serbes locaux.
Seuleument une partie de la Croatie, càd 11 communes où les serbes étaient
majoritaires (15 000 km/carré). Ces 6 mois de guerres aboutissent à une
armistice où le gouvernement croate a réussi à survivre mais contraint de
laisser 28% de son territoire aux rebelles soutenus par la Serbie.
Arrivée de force
de l'ONU (FORPRONU) fin janvier 92
pour séparer les combattants et faire respecter l'armistice, renouvelable tous
les 6 mois. En aout 95 les croates se sont sentis assez forts pour attaquer et
récupérer les 28% de leur territoire, exception faite de la Slovanie.
Bosnie Herzégovine avril
92 – décembre 95. La crise la plus
grave et sans doute la plus complexe.
Forte population serbe qui n'est pas majoritaire, mais elle représente 36% de
la populaon en 1991, leur leader politique disait qu'ils étaient menacés, par
conséquent ils ne voulaient pas de l'indépendance de la Bosnie en raison de
leur position de peuple constitutif, soit des sous ensembles de
minorités/peuples importantes constitueant la Bosnie. Ils considèrent, du fait
de leur important nombre avoir le droit d'être un membre du pouvoir avec un
droit de veto, faute de quoi ils menacent de destruction les musulmans
(massacres de Bosnie).
Le 6 avril 92,
la Bosnie devient membre de l'ONU, son indépendance
est acceptée internationalement. A partir de là une guerre très dure s'en
suit, avec des massacres « purification ethnique », càd le massacre
des populations minoritaires, qui ne font pas parties de l'ethnie majoritaire dans
les zones contrôlées. Ces violences sont surtout pratiquées par les Serbes, avec
une supériorité de ces derniers au point de contrôler 78% de la Bosnie
indépendante.
Intervention des casques bleus pour séparer les
combattants, respect des armistices mais relatif, car les zones de sécurité
n'étaient pas toujours respectées et des massacres n'ont pu être empêchés.
Avril-juillet 92, ensemble de massacres dont le plus
connu, massacre de Sebrenica, siège de
Sarajevo.
La situation s'est retournée pour des raisons indépendantes du contexte bosniaque, au départ personne
ne voulait y intervenir, Bill Clinton
a pris une résolution en mars 94
poussant les acteurs à modifier leur position. Accord de Vienne, entre la Croatie, la Bosnie, et les
milices croates de Bosnie en vue d'une alliance. La structure des forces se
retourne, USA forcent les croates à soutenir la Bosnie pour la récupération de
son territoire face aux serbes. La guerre s'est militairement arrêtée, les
troupes bosniaques et croates ont contre-attaqué et récupéré plus de la moité
du territoire bosniaque.
Négociations de
Dayton,
convocation des chefs d'Etats yougoslaves pour négocier les conditions de la
paix, sachant que le plus récalcitrant était menacé de bombardements de la part
des US.
Traité de paix du 14 décembre 95 à l'Elysée qui fixe les conditions de la nouvelle
paix. Fin officielle de la guerre en
Bosnie.
On constate que les serbes par leur lutte ont obtenu 49%
du territoire pour 36% de la population. Symbole fort pour les autres
mouvements de contestation, à force de lutte on obtient quand même quelque chose
en obligeant une intervention étrangère (US). Cette logique permet de
comprendre le conflit Kosovar qui est en réalité une lutte à mort.
Les US ne veulent absolument plus le schéma bosniaque càd
des massacres locaux, un enlisement de la guerre sans aucune intervention,
cauchemars à éviter.
Dans le cas de ce conflit il faut retenir l'importance des accords de Dayton à
travers le traité de l'Elysée. Il faut insister sur l'importance de la guerre
de Bosnie-Herzégovine, même si la guerre du Kosovo est la plus Yougoslave. La
complexité des accords de Dayton institue
un régime très spécial qui est à l'origine des difficultés actuelles de la
Bosnie (centre musulman). Une agitation qui tient officiellement à la pauvreté,
mais implicitement il y a l'idée que la structure de la Bosnie sous les accords
de Dayton est trop compliquée et couteuse, et du coup la rend moins attractive.
On y trouve dans la constitution de la Bosnie, des
accords de délimitation des territoires - 2 entités sont créées, sous un
système fédéral :
-
la
République serbe – 49% du territoire bosniaque ;
-
la
Fédération Bosno-croate – 51% du territoire. Regroupe les bosniaques
(musulmans) – [mot : « bosnien » utilisé pour nommer les
habitants de l'ensemble de la Bosnie].
La partie de la Bosnie la plus peuplée
certainement. Cela n'induit pas qu'il n'y a pas de musulmans de l'autre côté,
mais les droits politiques ne sont pas du même ordre, de l'autre côté ils ne
peuvent voter ou être élu par exemple.
Au niveau du
gouvernement, on retrouve le système prévu pour Chypre à savoir que lorsque le dirigeant n°1 est d'une ethnie,
son second doit venir d'une autre, on trouve ça dans le traité même et la
constitution. Pendant les 5 premières années après le traité de l'Elysée une Court des Droits de l’Homme est
instaurée en Bosnie, elle comprenait une majorité de juges étrangers pour
éviter les discriminations. Il s'agissait là d'un défenseur de droits sous
forme de cours de justice ; chaque citoyen qui se sentait lésé ou
discriminé en raison de son origine ethnique pouvait y faire appel.
On trouve dans la fédération bosno-croate :
·
des
cantons croates (la Herzégovine occidentale) - Les Bosniaques veulent supprimer
un certains nombres de cantons en raison du mille feuilles administratifs que
cela produit, et qui posent en outre des problèmes en terme de dépenses
publiques.
Une zone de tension car les Croates ne
veulent pas la suppression de leurs cantons. Beaucoup de personnes considèrent
qu'il faut revoir les cantons mais au niveau local cela n'est pas évident, ni
forcément souhaité. La suppression des cantons provoque la colère des Croates
d'Herzégovine, et certains Croates de Bosnie centrale. D'autant qu'il y a une
forte émigration des bosniaques vers l'extérieur notamment vers la Croatie.
Les personnes qui veulent la réforme
sont surtout extérieures à cette zone, il est toutefois problématique d'en
envisager l'application pour les raisons que nous avons soulevé. Les réformes
des uns ne correspondent pas aux désirs des autres.
Les structures de Dayton paraissent donc figées pour le
moment, ces questions et ces complexités empêchent les désirs d'investissement
étrangers voire constituent un frein à une éventuelle intégration à l'UE du
fait de cette instabilité latente.
Kosovo mars
98 ou 99 – juin 98 ; ultimatum 24 mars – 3 mois de bombardements pour
que Milosevic abandonne le Kosovo. Elle est la 4e guerre Yougoslave. On a à la
fois un mouvement en interne et en externe, un mouvement de retro-action par
rapport au passé.
Désir des albanais de devenir indépendants, et volonté
des Serbes de reprendre la main sur ce territoire.
Les acteurs, à partir de 98, agissent en fonction de ce
qu'ils ont appris du conflit bosniaque : en se battant à mort on parvient à arracher des grosses concessions,
à l'image des serbes de Bosnie qui ont réussi à arracher une grande partie du
territoire et une forte autonomie.
D'où l'idée suivante, puisque la lutte pacifique n'a
conduit à aucun résultat tangible, une guérilla sanglante pourrait alors
provoquer l'intervention de la communauté internationale. Ceci explique les attentats
d'abord en nombre limités, puis en plus grand nombre à partir de mars 98, avec une véritable guerre interne au Kosovo
qui par la suite est devenue une intervention/guerre extérieure.
Mars 98 : drame fondateur : la région était soumise à différents états
de sièges, militairement envahis par les Serbes depuis 93. En 98 au bout de 9
ans de régime d'apartheid, une série de violences provoquent une répression
très dure de la part de la police serbe et notamment le massacre de la famille
emblématique des Yashari qui voit 53 de ses membres tués. C’est cet évènement
qui met le feu aux poudres, qui explique l'expansion des violences à partir de
cette date-là.
Devant toute cette violence, l'armée serbe se retire en
premier lieu, laissant la police oeuvrer, mais elle décidera de contre-attaquer
par la suite (armée de chars, avions etc.). De manière prévisible elle
reconquiert le territoire face aux guérillas ce qui provoquent des déplacements
de populations, des destructions, un premier exode interne et externe des Albanais
de Kosovo → effets perturbateurs pour les voisins.
Les puissances étrangères s'agitent car les réfugiés
arrivent en Macédoine, Albanie, pays voisins, les US qui ont essayé de gérer la
guerre de Bosnie, commencent à s'énerver et à réprimander les Serbes. Plusieurs
réunions du Conseil de Sécurité (résolutions
1099 et 1101 sur le Kosovo) qui condamnent
les auteurs de la répression, la violence des deux parties et menacent
d'intervention.
Richard Holbrook,
diplomate US, qui avait fait signer les accords de Dayton aux acteurs locaux,
rencontre Milosevic, et menace de bombardements si le retour au calme ne se
produit pas. Il appelle donc à trouver
une résolution politique à la crise, avec éventuellement une certaine
autonomie du Kosovo, pour que les albanais ne se sentent plus opprimés et qu'il
n'y ait plus de conflit.
Entre septembre 98 et mars 99 contorsions qui va durer quelques
mois, hésitation de Milosevic. Dans un premier temps, l'armée serbe se retire
en grande partie des régions du centre du Kosovo, des observateurs
internationaux (plus de 1000) arrivent au Kosovo, avec en plus 20 000 personnes
chargées de leur protection, notamment des Américains. L'armée serbe se replia
dans les villes du Kosovo. Non guerre de positions pendant quelques temps. Une
série d'incidents viendra y mettre fin dont l'incident de Racak, 15 janvier 1999, fausses communes où l'on
trouve une série de corps d'albanais, perçu comme un signe de génocide, comme
le signe d'un événement inacceptable, tension de l'opinion dû au souvenir du
conflit de Bosnie.
Cet événement provoque
la dernière phase de la crise, les européens (FR-GB) convoquent une Conférence de la Paix à Rambouillet fin janvier 1999 qui durera jusqu'à février pour se
mettre d'accord, schéma d'accord contraignant pour la Serbie, une autonomie
substantielle pour le Kosovo avec par la suite référendum pour obtenir l'indépendance.
Signature de l'accord par la Serbie,
les autres refusant de signer la Serbie pense que cela leur portera préjudice.
L’OTAN a fixé une date limite répressive sous menace
d'intervention. Ainsi pendant presque un mois et demi, il y a eu une vague de
bombardements sur l'ensemble de la Serbie pour mettre en place cet accord.
Milosevic a fini par céder, signe l’armistice
le 3 juin, le 9 juin signature de la
résolution 1244 de l'ONU, les accords
de Kumanovo qui fixe les conditions de l'abandon du Kosovo par la Serbie.
Dans le cadre provisoire qui a duré au moins jusqu'en 2008, cela signifie que
l'armée serbe a abandonné le Kosovo pendant une période dont le terme n'est pas
fixé, le Kosovo sera administré par
l'ONU, administration internationale provisoire
donc, dont le premier administrateur sera B. Kouchner (jusqu'au printemps
2001), joint à la KFOR, force militaire qui comprend 50 000 hommes (contingents
ALL, GB, FR, US, Russe etc). Quatre secteurs d'organisation militaire du Kosovo
dirigés respectivement par les Allemands, les Français, les Britanniques, les
Américains et un peu les Italiens. Il s'agit l'un des premiers cas où les
Allemands ressortent de chez eux militairement.
Une crise unique, car aucun bombardement de la sorte
n'est survenu dans aucune autre crise, ni une telle intervention d'une telle
ampleur. Il y a un aspect inédit à
cette crise. S'agissant du Kosovo lui-même il y a eu un régime international
particulier avec diminution progressive du nombre de militaires et une
européanisation (les US sont partis), plus encore proclamation de l'indépendance
du Kosovo en 2008.
Nous sommes aujourd’hui dans contexte un peu spécial, puisque
l’indépendance du Kosovo n'a pas été reconnue par le Conseil de Sécurité de
l'ONU et beaucoup d’autres pays dans le monde. A l'heure actuelle le Kosovo est
reconnu par 99 états dans le monde
sur 193. Cela veut dire du point de vue juridique, que le Kosovo ne pourra être
admis à l'ONU que s’il obtient une majorité des 2/3 des Etats membres de l'AG. Le
droit de veto qui s'exerce au sein du CS n'empêcherait pas le Kosovo d'être
membre de l'ONU mais d'avoir un régime juridique bien retenu, de sorte qu'en
droit international pur, le Kosovo n'est pas encore un membre.
Parmi les 94 Etats membres qui refusent : 5 membres
de l'UE (Espagne, Slovaquie, Roumanie, Grèce, et Chypre). La sécession du
Kosovo s'est faite par la force occidentale, dans un trou noir du droit
international : quels sont les droits de sécession ?
Macédoine en mars – juillet 2001 et le Monténégro en
2006, prennent leurs indépendances sans guerre, parce qu’ils se sentent
appartenir à un même monde culturel. Cela ne signifie pas que cela s'est fait
dans la joie pour la Serbie, mais il n'y a pas eu de recours à la violence.
Depuis 2008, 7 Etats sont issus de l'ex-Yougoslavie.
La
gestion internationale de la crise - Les différentes phases
1.
La
phase européenne ?
La crise yougoslave aurait pu être gérée par des
structures européennes.
Il y s’agit d’une gestion européenne au moins jusqu’en septembre
1991. Dès le 25 septembre 1991 une
résolution 753 du Conseil de l'ONU qui interdit de livrer/vendre des armes
aux protagonistes. Le simple fait qu'on ait dû le faire prouve que la crise n'a
pu être gérée par l'Europe.
La proclamation de l'indépendance de la Slovénie et de la
Croatie, est synonyme d’une première rupture ; sur le plan symbolique,
lorsqu'une partie d'un Etat fait sécession cela peut attirer définitivement
l'attention des autres. Ceci a provoqué des événements violents dans ces deux
pays.
L'Europe sous sa forme Communauté Européenne (CE), a
voulu résoudre la crise, convoquant une sorte de conférence à Brioni, ex île de
Tito, Accords de Brioni du 8 juillet 1991.
Les protagonistes disent qu'ils vont geler les indépendances, que les troupes
fédérales vont se retirer ; entre temps on convoque une conférence de la
paix à La Haye pour discuter sur organisation européenne. Ceci signifie que les
instances européennes, espèrent résoudre
la question dans les trois mois ou un peu plus.
On verra très vite, suite à la commission Badinter (président
du Conseil constitutionnel), se réunir différents présidents d'Etats membres de
la CE de l'époque, pour s'interroger sur l'état de la région et sur les
solutions à y apporter, notamment en ce qui concerne les conditions juridiques
de la sécession lorsqu'on fait partie d'une fédération. Une série d'avis sera
donnée, dans la mesure où il ne s'agissait pas d'une cour de justice instituée.
Les accords de Brioni seront acceptés et appliqués, la
période de transition de 3 mois sera juridiquement respectée (pas
militairement). Le chef d'Etat yougoslave n'est pas respecté par son armée Yougoslave
ce qui donne la tonalité de la crise. On va jusqu'à proposer le 19 septembre
1991 d'envoyer des observateurs européens sur le terrain. L'UE va se résoudre à
une solution un peu résignée ; après de nombreuses discussions
franco-allemandes, la position allemande spontanée est de reconnaître les
indépendances. La perception Française est inverse, du fait de leur histoire,
une fois qu'un Etat est uni le désunir est une abomination, une chose
inconcevable, voire un malheur dans leur conception. On assiste donc à une
incompréhension culturelle.
Le 16 décembre 91
le Traité de Maastricht est connu, fondateur de l'Europe ; les
Français acceptent la reconnaissance des Etats nouveaux à condition que ceux-ci
soient satisfassent les préconisations de la commission Badinter. Elle
reconnaît juridiquement que la fédération yougoslave est en voie de
décomposition. Du fait de la constitution Yougoslave et de la jurisprudence
récente de la Cour Internationale de Justice (Affaire Mali vs Burkina) on peut se séparer à condition de respecter
les frontières qui avaient déjà été fixés avant, ce que les juristes appellent utis
posidetis juris. Ce qui signifie que l'on n’a pas le droit de
recomposer les républiques fédérées entre elles, la Serbie n'a pas le droit
d'annexer les autres communes, car les deux ont des statuts de républiques
fédérées selon les frontières d'avant. Cela signifie que pour faire sécession
il faut se préparer avant, avec un statut à part – le changement suppose
d'avoir déjà changé auparavant. En cela le Kosovo n'était pas envisagé dans une
perspective d'indépendance.
2.
La phase ONU
A partir de janvier 92 : la CE n'arrivant plus à gérer la guerre, on est
passé à une gestion onusienne de la
crise ; on a envoyé successivement (plusieurs phases) les forces (casques
bleus) de l'ONU sur le terrain ; notamment pour :
-
faire
respecter l’armistice jusqu'en aout 95 en Croatie (plus ou moins respecté).
-
Force PRONU en Bosnie, force de l'ONU, résolution
de création avec un mandat qui lui explique ce qu'elle doit faire. Celle-ci est
créée fin juin 92, durera jusqu'aux accords de Dayton (fin 95) provoquera beaucoup
d'événements sanglants.
Le 28 juin 92, Mitterrand se rend à Sarajevo, où il
contribue à figer une situation provisoire, en créant une force PRONU pour la
Bosnie, comptant jusqu'à 18 000/20 000 hommes, pour le maintien de la paix. Relativement peu armée (pas d'armes lourdes)
elle ne pouvait donc pas se battre durablement face aux forces en place.
Mai 95, 300 soldats de la force PRONU sont capturés par l'armée serbe, dont 160 Français,
ce qui témoigne de la difficulté d'avoir les moyens pour la mise en œuvre d'une
politique.
Il y avait une double clé, le représentant du Secrétaire Général
de l'ONU, avec son délégué, qui refusait l'intervention et l'emploi de la
force, de sorte que dès qu'il y avait une attaque violente, le Secrétaire Général
devait consulter ce délégué qui devait lui-même consulter New York, pour avoir
autorisation d'intervenir, pour ensuite en cas d'accord contacter l'OTAN en Italie
à un circuit compliqué, long, qui
explique l'inefficacité relative de l'ONU (zones sous protection de l'ONU ont
été attaquées).
La phase ONU a été relativement paralysante.
3.
La phase Américaine
(1994-99)
Face à cela s'est développée une phase US. La crise s'est
déroulée suite à l'intervention US. Intervention progressive, et à contre-cœur
sans doute. Le président Clinton est élu en 92 ; les USA étaient
interloqués devant la crise, mais indécis sur le rôle à y jouer, pas de
mouvements clairs (notamment de la part de son prédécesseur Bush père). USA
donc irrésolu.
Année 93 année d'expectative : la guerre devient généralisée en Bosnie, et les US laissent faire,
avec une guerre de tout le monde contre tout le monde. Dès juillet 93 les Croates
échouent et perdent du terrain, encerclés en Bosnie centrale ; en novembre
93, Tucman ordonne aux croates de faire un cessez-le-feu contre les bosniaques,
sous pression des US.
Clinton ordonne donc aux Croates de se poser en vue d'une
coalition anti-serbe, concrétisée par
les accords Washington et de Vienne, qui sont les vrais tournants de la guerre, imposés par les
US. Ce sont des accords entre les différentes composantes Croates et la Bosnie
Herzégovine qui se mettent d'accord pour ne plus se faire la guerre, et unir
leurs forces politiques et militaires contre les bosno-serbes appuyés par la
Serbie, donc in fine la Serbie.
Dans la gestion de la crise on voit un groupe de contact
se former, càd des pays qui s'estiment concernés, les 4 vainqueurs de la 2GM
dont la Russie, présidé par Juppé – 4 permanents euro-atlantique + ALL + IT.
Ils se réunissent afin de proposer des
solutions.
Différents plans de partages de la région :
·
Plan
Jupé-Kinkel propose le partage à 2
entités 51-49% de la Bosnie.
USA ont ainsi créé de nouvelles alliances sur place, et leur
ont fourni des armes et une formation militaire via sociétiés privées
constituées d'anciens militaires à la retraite. Ils laissaient en outre, intervenir
l'Allemagne et les pays du MO.
S'agissant du MO cela supposait d'arriver sur place grâce
à une autorisation de la Croatie pour parachuter les armes en Bosnie. Ce qui
explique que progressivement le rapport de forces ait changé.
Par ailleurs, les US menaient des négociations entre
Croates et Serbes, on faisait comprendre à la Serbie qu’elle ne devait pas
intervenir, même si elle a cherché à tempérer les Serbes de Bosnie qui
refusaient l'accord et voulait garder les 78% du territoire. L'OTAN sous sa
forme aérienne est donc intervenu en bombardant les installations des serbes
pendant deux mois et douze jours, de sorte que leur défaite était imminente.
4.
Ré-européanisation
de la crise Yougoslave
A partir de 2004, les forces militaires en Bosnie et même
au Kosovo retrouvent une étiquette européenne avec une gestion de Bruxelles, avec
cette ambiguïté car Bruxelles est également le siège de l'OTAN, avec un noyau
militaire US, si jamais l'équilibre venait à être renversé.
La force militaire était descendue à 400 000 hommes, ce
qui a supposé certaines difficultés mais qui n'ont pas été nécessairement
mortel.
Le
Tribunal Pénal pour l'Ex-Yougoslavie (TPY)
La Crise Yougoslave a été l'occasion pour créer une nouvelle
structure pénale internationale, la première depuis Nuremberg ; auparavant
il n'existait pas de tribunal pénal international dans le monde, qui avait fixé
des principes sur les crimes contre l'humanité et génocides.
Avec la crise Yougoslave (les événements de Bosnie, et les
camps de concentrations et les massacres d'albanais (été 92)), s'est développée
l'idée que des choses intolérables se passaient et qu'il fallait agir, militairement
et politiquement, mais surtout juridiquement.
Les USA et la France ne voulaient pas intervenir de
manière puissante en 1992, ils ont proposé d'agir autrement en créant le TPY.
En février 93, on a créé la résolution 808 de l'ONU qui a créé le TPY
(la résolution 827 créé son statut).
C’est la première Cours Pénale internationale permanente ;
au début peu de moyens, mais c’est devenu un grand tribunal par la force des
choses, qui existe encore aujourd'hui. La
fin de son fonctionnement est fixée
en décembre 2014, cas unique pour un
tribunal ad hoc, pour une question
précise, compétent pour les crimes
commis dans les frontières de
l'ex-Yougoslavie du 1er juillet 91
jusqu'à la fin 2014. Il compte à l'ONU 100 millions de dollars par an. A
l'heure actuelle on compte 161 accusés (comparé à 21 pour Nuremberg), 18
acquittés, 141 jugés, 75 accusés, 20 procédures encore en cours, 5 affaires en
appel à l'heure actuelle, qui concernent 16 individus, 5 procès encore en cours
qui concernent les principaux acteurs (dt Karadzic, Radovan, Mladic etc.).
Milosevic a perdu le pouvoir en novembre 2000, il a été
livré le 28 juin 2001 par le gouvernement qui lui a succédé, premier ministre
Zoran Ajundic.
La Crise Yougoslave a amené à créer des bouleversements
nombreux à l'image du TPY, il semble qu'on ne verra plus un tribunal pénal
international de cette ampleur. C’est un cas unique de tribunal pénal international qui
dure 22 ans avec un certain succès d'ailleurs. Il y a bien le TPIR mais il est
moins puissant.
Editions Pedone, Justice
Internationale, partie sur Yougoslavie par Krulic.
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