Le Musée des Civilisations Méditerranéennes, à Marseille.
La
France Méditerranéenne : entre normalisation et autonomisation
Cette zone comporte
quatre régions françaises
le Languedoc Roussillon (chef lieu, Montpellier), la région Provence Alpes
Côtes d’Azur (dite région PACA, chef lieu Marseille), la Corse (chef lieu
Ajaccio) et Monaco. C’est un espace très tourné vers la Méditerranée avec un
héritage colonial et méditerranéen qui pèse beaucoup. C’est aussi un espace
fait d’entreprises politiques très autonomes ce qui en fait un enjeu important
lors des prochaines élections municipales et européennes. La forte
médiatisation de cet espace en fait donc une zone très particulière de l’État
français.
I.
La différenciation
politique
1.
Une « sous-région » divisée
Historiquement, on
avait des départements classifiés comme étant « du Sud » ou « du
Midi » mais ils n’avaient pas de véritable existence administrative. C’était un territoire tourné
vers la Méditerranée et les colonies. En
1956, on donne une existence à ces régions
sur le papier, avec la création de la région PACAC (le dernier C représente
la Corse) ou Languedoc-Roussillon. Le nom même de ces espaces montre à quel
point cette construction est artificielle (à l’inverse de l’Aquitaine ou de la
Bretagne). Notons qu’au début, la Corse ne formait qu’un seul département (numéro
20) compris dans la région PACAC.
En 1962, deuxième évènement important pour cet
espace, la décolonisation.
En effet, les rapatriés des anciennes colonies françaises se réfugient au plus
proche et viennent s’installer dans cet espace. La France Méditerranéenne
devient donc le pôle principal d’immigration en Europe. C’est ainsi que
Marseille devient une ville cosmopolite avec des grandes communautés.
En 1972, les régions ont de véritables droits
administratifs.
En 1975, la Corse est scindée. Non seulement la Corse devient
une région à part et quitte la région PACA, mais en plus, deux départements
sont créés Haute-Corse (2a) et Corse du Sud (2b).
En 1982, la période de décentralisation fait de la
Corse un lieu d’observation.
On applique des lois à la Corse et en fonction des résultats, on généralise le
système ou non. On y teste le droit électoral entre autres.
En 1986, les tests effectués en Corse sont mis en
place dans le reste de la France.
La région PACA et le Languedoc-Roussillon ont donc les mêmes prérogatives que
la Corse. Immédiatement le Front National (FN), le Rassemblement Pour la
République (RPR) et l’Union pour la Démocratie Française (UDF) mettent en place
des coalitions pour diriger cet espace. Aujourd’hui encore, la question d’une
droite très conservatrice dans le Sud de la France demeure active.
En 1992, cette sous-région est divisée mais se
normalise sur le plan politique.
En effet, avec des élections qui ont amenées des alternances, on voit la fin
des coalitions avec le FN. On a aussi un éloignement de la Corse qui
s’amorce avec quelques points légaux qui
font de la Corse une zone d’outre-mer. Cela se confirmera en 2010, avec l’élection au conseil régional
d’autonomistes corses qui ont voté, en 2013,
la cooffficialité de la langue corse et française.
2.
Le cas de Monaco
Que
faire de l’État de Monaco ? C’est un État très petit sur le papier, la
preuve en est qu’ils construisent sur la mer. La côte ne fait que 3 km de long,
mais si l’on comprend l’espace maritime, on a du Nord au Sud 88km. C’est un
espace très cher et très riche. Monaco s’est développé au XIX° siècle dans un traité avec la France qui lui
a donné son indépendance. C’est un État
relativement démocratique avec sa propre constitution. Monaco est à l’ONU,
au Conseil de l’Europe, signe que c’est un État reconnu internationalement. Et
pourtant sur d’autres plans c’est étrange, par exemple, Monaco fut champion de
France au football.
Donc à la fois très
intégré dans le fonctionnement français, Monaco reste un État indépendant avec une religion d’État, une
royauté constitutionnelle et un système fiscal très particulier. L’évasion
fiscale de Monaco est très connue mais peu en France car ce système fiscal est
interdit aux Français.
3.
Les spécificités des territoires de la France du Sud
Cette
sous-région assez divisée ???. Première
hypothèse, l’État français serait-il plus faible dans cet espace ? On peut
supposer que oui. L’État français est plus poreux et plus remis en question
dans son espace méditerranéen. Ainsi, on constate qu’il a des difficultés à
intervenir contre la pègre marseillaise. Peut être que cela demande du temps,
mais pour le moment, l’État a du mal à y intervenir. Ainsi les travaux locaux
doivent être acceptés par des organisations criminelles moyennant des
rémunérations. On peut noter la faiblesse du système sécuritaire de l’État
aussi qui a du mal à appréhender lesdits criminels.
La
nuance peut être apportée si on considère que tous les évènements
journalistiques se limitent à Marseille, pas particulièrement à la région. On a
donc une normalisation régionale avec une exception marseillaise. On peut
rajouter un second bémol, la criminalité dans les Alpes maritimes qui se fait
pourtant avec très peu de violence (blanchiment d’argent sale, …).
Autre spécificité,
la Corse, une région qui s’autonomise progressivement. Le rapport avec l’État est
d’ailleurs très difficile depuis que les nationalistes corses ont pris un tiers
des sièges du conseil régional. Historiquement, la France est l’État colonial
et on a vu émerger le Front de Libération National Corse (FLNC, en référence au
FLN d’Algérie). Il y avait aussi un terrorisme corse tourné contre les
« continentaux », habitants de la France métropolitaine, mais aussi
contre les institutions françaises (commissariat, palais de justice, …). Enfin,
il y a une autonomisation de la culture corse qui en fait un espace social plus
différencié que le reste de la France. D’ailleurs on a quelques clans familiaux
qui dominent en Corse et l’État est parfois instrumentalisé, parfois il doit
négocier avec eux.
Pour le
Languedoc-Roussillon, on a une particularité inverse, c’est une des régions les
plus dépendantes de l’État
en termes d’emplois publics, de financements, de redistribution, … Cet espace a
été complètement aménagée par l’État en 1955,
on en a fait une zone balnéaire pour les classes populaires (type la Grande
Motte). On a donc une spécificité aussi de cette région.
Deuxième ensemble
de spécificité, celle des élites politiques. On a tendance a souvent se
demander dans ses régions ce que fait l’État. On a donc des élites politiques
plutôt « traditionnelles »,
plutôt issues de la notabilité, blanches, catholiques, masculines, … Alors
même que les populations locales sont très diversifiées. Monaco est encore plus
particulière du fait que c’est un micro-État monarchique. Pour la région PACA
et Languedoc-Roussillon, les élites sont assez traditionnelles quand la
population est diversifiées (Italiens en région PACA ; Marocains en Corse ;
pieds-noirs et maghrébins à Nice, Montpellier, Perpignan, Marseille ;
Gitans à Perpignan, Arméniens à Marseille). On a la dimension très
traditionnelle de certaines élites comme Jean-Claude
Gaudin, tout en ayant de nouvelles élites très diversifiées venues des
immigrés, tout en se confrontant aux élites du Front National.
II.
Le champ politique
1.
Des leaderships « atypiques »
C’est notamment le
cas avec le Languedoc-Roussillon dont on connaît les grands noms : Jacques Blanc et Georges
Frêche.
Le premier a fait deux coalitions avec le FN. Le second qualifié de populiste
avec un clientélisme affiché et revendiqué, a eu des propos véhéments contre l’État
français, où ses propos racistes (sur les Noirs en équipe de France, les
Harkis, …). Du coup, les élections de 2010,
il a du les faire seul car aucun parti ne le soutenait. En dépit de cela, il a
gagné assez largement ces élections régionales. Son succès tient à sa politique
de construction très visible entre autres.
En Corse, on trouve
deux présidents,
celui du Conseil exécutif de Corse et celui de l’assemblée. Cette bicéphalie
permet d’éviter un leadership d’un seul individu.
Auparavant,
on a longtemps eu des chefs de clans qui tenaient des mairies, des régions, …
Dorénavant, cela devient assez rare et c’est donc notable.
2.
La normalisation ?
Le cadre de la
région PACA illustre cette normalisation. Ainsi Nice,
a longtemps été gouverné par la famille Médecin
entre 1928 et 1991, de tendance
extrême-droite. En 1991, le fils Médecin est
parti en Uruguay suite à une grosse affaire de corruption. En 1995, après avoir quitté le FN, Jacques Peyrat passe et devient maire de Nice jusqu’en 2000. En 2008,
c’est une alternance classique qui a lieu avec l’élection de Christian Estrosi. La vie politique a donc été
très particulière.
Autre
exemple, le cas de Marseille, avec Gaston Defferre qui a dirigé une mairie
droite-gauche avec des soutiens plus ou moins douteux de
1953 à 1986. On a ensuite eu des mandats courts et très instables, puis
cela s’est stabilisé avec Jean-Claude Gaudin
pour trois mandats et un potentiel quatrième mandat. On a donc eu une
alternance à peu près stable depuis 1986.
Troisième
exemple, les élections des Bouches-du-Rhône,
dirigées par Jean-Noël Guérini depuis 1998, un homme politique très controversé
mais en place depuis peu de temps. Controversé dans son propre Parti (le PS),
il est mis en examen dans plusieurs affaires, ce qui semble le plomber pour les
prochaines élections.
Dernier
exemple reflétant la normalisation de la vie politique, c’est la Côte d’Azur. Ce département est tenu
entièrement par l’UMP de Menton à Cannes. On a toujours quelques petites
particularités avec des candidats qui se tirent dans les jambes, comme à
Cannes. Mais on constate une normalisation de l’extrême-droite vers une droite
UMP plus classique.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire